Et si un client affirmait avoir contracté le virus chez vous ...
"Ne parlez pas de malheur !..", c'est certainement la réaction qui vous vient immédiatement à l'esprit et vous avez raison. Car, si l'activité n'a pas encore repris et que le plein régime n'est pas pour tout de suite, il n'est pas innopportun de se poser cette question ...
Aux Etats-Unis où la judiciarisation de la vie quotidienne est monnaie courante, chaque jour apporte son lot de clients qui attaquent commerçants, hôtelies, restaurateurs et fournisseurs pour une raison ou une autre. Normal, dès lors, que dans ce pays la question d'un client qui prétendrait avoir contracté le coronavirus chez un hébergeur ou un pro des loisirs commence à faire couler beaucoup d'encre chez les spécialistes du droit.
Toutefois, sans rentrer dans les détails des débats - pour la plupart, très américano-américains - une chose essentielle est à retenir : "Si vous avez fixé un protocole, respectez-le bien !"
On parle beaucoup de protocoles sanitaires depuis des semaines et l'on sait que beaucoup d'établissements hôteliers, de loisirs et de restauration ne pourront ouvrir qu'au prix d'un engagement clair et précis sur des séries de mesures tendant à protéger clients et employés de l'une contagion possible au coronavirus.
Aux Etats-Unis, où les spécialistes se projetent dans un futur proche où un client pourrait attaquer un pro du tourisme, c'est bien le protocole sanitaire qui est en question. Explications ...
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A part si votre client n'a pas quitté votre hébergement pendant 7 ou 14 jours (ce peut être le cas d'un camping, par exemple), il lui sera très difficile de prouver qu'il a attrapé le (la !) coronavirus dans votre établissement. La covid-19, étant donné son taux élevé d'infection, est plus difficile à retracer, et cela donne un avantage à l'hôtelier qui se verrait confronté à une action en responsabilité civile de la part d'un client courroucé.
Aux Etats-Unis, de nombreux cabinets d'avocats planchent déjà sur la question, notamment à la demande d'associations hôtelières ou de propriétaires. En l'état actuel des débats, tous s'accordent à dire qu'une action en justice doit reposer sur la preuve ... ou le commencencement de preuve. Et, en ce qui concerne le coronavirus, démontrer qu'une infection a eu lieu dans tel ou tel établissement peut s'avérer impossible dans une immense majorité de cas.
Toutefois, selon ces mêmes juristes, si la preuve de l'infection est compliquée voire impossible à apporter, celle que l'hébergeur a été négligent et pourrait donc être à l'origine d'une infection possible reste plus-que-probable. Et dans ce cas, le protocole sanitaire peut rapidement ressembler à un talon d'Achille.
Pour les juristes américains, avoir mis sur pied un protocole sanitaire et se révéler négligent sur son application pourrait vous coûter très cher: un client peut, en effet, démontrer que les règles de base édictées dans vos documents ne sont pas respectées (des employés ne portant pas de masques, l'absence de flacons de gel hydroalcoolique dans les lieux d'accueil, une piscine ouverte à tous les vents et des serviettes non isolées ...). Prendre une ou plusieurs photos et videos de votre établissement et de vos employés en marge de toute application de protocole est à la portée de tous et pourrait vous coûter très cher devant les tribunaux. D'autant plus que l'ambiance générale est encore à la suspicion réciproque et généralisée ...
Pour de nombreux avocats américains, une photo (donc, une ou plusieurs preuves) de ces négligences et un client un peu trop procédurier peut vous entraîner dans les méandres d'une action en justice carabinée.
Car, comme le soulignent les juristes de chez Goodwin, une des plus grandes firmes d'avocats au monde: "Généralement, les tribunaux examinent ce qui est raisonnable dans les circonstances. Donc ce qui était raisonnable en février sera différent de ce qui est raisonnable à partir de maintenant. Un hôtel qui ne prend aucune précaution maintenant n'est pas raisonnable alors qu'en février, aucun hôtel n'avait vraiment pris de précautions importantes."
En clair, le protocole sanitaire ne doit pas servir à faire joli et encore moins à ne durer que les quelques premiers jours de l'été. Au risque d'en faire trop, appliquez-le et faites-le appliquer avec une rigueur tatillonne de tous les instants car ce qui est une force "marketing" aujourd'hui pourrait devenir une faiblesse judiciaire demain. Et ce, d'autant plus que votre police d'assurance en responsabilité civile ne vous couvre pas forcément si un client "contaminé" faisait condamner votre entreprise pour négligence et mise en danger d'autrui ...