Booking, Airbnb, Vrbo font la cour à leurs catalogues respectifs

Booking, Airbnb, Vrbo font la cour à leurs catalogues respectifs

Les OTAs élargissent sans cesse leur périmètre d’action en complétant leur éventail de fonctionnalités et en multipliant leurs imbrications. Dans une sorte de "concurrence-partenariat", il est de bonne guerre pour chaque plateforme d’espionner l’autre et de profiter de ses avantages. En 2021-2022, la bataille silencieuse disputée par Booking, Airbnb et Vrbo se joue sur trois paramètres : l’offre d'hébergements, le positionnement et le prix.

Une certaine convergence est en marche entre les OTAs. Ils se ressemblent de plus en plus, mais conservent leurs propres spécialisations, points forts et identités. Leur rivalité est toute calculée, chacun préserve son domaine de prédilection et tire profit de sa différenciation. Un certain respect a beau exister entre les "confrères" Airbnb, Booking.com et Vrbo (groupe Expedia), les ingéniosités et segments de marché captés par les uns sont enviés… voire carrément exploités par les autres. Les rapports de force deviennent compliqués à discerner, car certains OTAs diffusent les annonces des autres. Au finish, c’est Booking qui fait passer les deux autres plateformes par son propre entonnoir.

Les points forts des OTAs reconnus et convoités par les autres :

  • L’offre abondante d’Airbnb
  • Les prix prix bas d’Airbnb
  • Les avantages concurrentiels de Booking.com
  • L’abondante offre familiale et les grandes locations de vacances de Vrbo.

Qui veut quoi (ou qui fait quoi) de l’autre ?

  • Vrbo convoite l'approvisionnement d'Airbnb.
  • Airbnb veut les grandes locations de vacances de Vrbo.
  • Airbnb veut les prix bas de Booking.
  • Booking importe automatiquement les annonces Airbnb et Vrbo pour attirer les clients solo qui lui manquent.

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Un rapport de force archi-favorable à Airbnb à Paris

Le cas de Paris, étudié en 2000 par Transparent Intelligence, met en évidence l’hégémonie de Airbnb parmi les OTAs (Homeaway est devenu Vrbo). La capitale est devenue "une ville Airbnb dans un bastion historique de Booking.com", observait l’expert en conseils pratiques Rental Scale-Up, le 12 octobre.

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Cette proportion est bien différente en milieu rural, ce qui souligne la pertinence des plateformes en fonction de la géographie et des modes de vie propriétaires et des envies des clients. L’étude de la ville US de Gatlinburg (zone montagneuse du Tennessee) place Booking à 35,9 %, Airbnb 0 32,6 % (en progression), Tripadvisor à 20,3 % et Vrbo à 11,2 %.

Entre Airbnb, Booking.com et Vrbo, on ne se marche pas (trop) sur les pieds !

Cela ressemble à un pacte de non-agression : les trois OTAs, en concurrence, restent séparés par un écart important. Par exemple, de nombreux petits hébergements Airbnb ne sont pas accessibles sur Vrbo. Le graphique suivant, produit aussi par Transparent Intelligence, révèle la grande fidélité des propriétaires Airbnb à leur premier distributeur : 83% de ces hébergeurs possédant un seul logement sont répertoriés sur Airbnb en exclusivité. A peine 7 % sont disponibles sur Airbnb et Expedia/Vrbo, 7 % sur Airbnb et Booking.com… et un dérisoire 3 % sur l’ensemble de ces plateformes.

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Les propriétaires présents sur Airbnb ont fait de cette appartenance une sorte de label, de sorte qu’ils hésitent à ouvrir la distribution vers les autres OTAs.

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1. Airbnb convoite les annonces "groupe" de Vrbo et les prix de Booking

Le point fort de Vrbo envié par Airbnb n’est pas la moyenne des gains, deux fois supérieure aux autres OTAs, mais sa capacité à attirer des offres adressées aux tribus : les amis, les familles ou les salariés d’une même entreprise en séjour de cohésion sont particulièrement bien servis sur la marque d’Expedia. Lors du dernier Skift Global Forum, organisé du 21 au 23 septembre à New-York, le PDG d'Airbnb, Brian Chesky, a déclaré que la prochaine opportunité pour son entreprise, dans les 10 prochaines années, serait les voyages en groupe et en famille. Le fondateur de HomeAway (devenu Vrbo), Carl Sheperd, a ajouté sur cet objectif est connu "depuis 40 ans" dans l'industrie de la location de vacances ! Pendant la pandémie, le marketing d'Airbnb s'est déplacé vers les maisons entières (chalets, des locations de vacances, appartements). Mais les familles montrées en exemple étaient surtout composées de 3 personnes : 2 parents et 1 bébé, 1 maman et 2 filles etc. Pendant ce temps, Vrbo mettait en scène des familles nombreuses et des groupes d'amis comptant au moins 5 personnes. Chacun a sa notion du groupe, Vrbo revendique une longueur d’avance dans ce domaine et affirme haut et fort que son expertise est inégalable… Ce qui reste alléchant pour Airbnb, qui peut gagner de l'argent sur des réservations à valeur élevée.

La parité tarifaire est une arme ! Le principal avantage concurrentiel de Booking est de tirer les prix au plus bas pour ses clients. Face à cette aptitude, Airbnb permet aux propriétaires, dans le rapport Insights de leur tableau de bord d'hébergement, de vérifier si l'annonce est plus chère sur Booking.com. Si tel est le cas, ces hébergeurs reçoivent le message "Comparez vos tarifs sur différents sites web". Ils vérifient instantanément si les tarifs Airbnb et Booking sont si contrastés que cela… ce qui leur permet d’ajuster la somme demandée, pour rester compétitifs. Pour rester redoutablement efficace, Airbnb n'hésite pas à afficher le logo de Booking.

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Airbnb propose aussi d’ajuster les tarifs des logements pour lesquels il trouve un prix global plus élevé que sur Booking : les propriétaires sont invités à rogner sur leurs tarifs de nuit, leurs remises hebdomadaires et leur forfait ménage. Ces astuces doivent garantir la compétitivité de la plateforme, qui, au fond, considère Booking comme Le thermomètre de la profession ... après Airbnb, selon ses fondateurs, bien entendu ...

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2. Vrbo capitalise la crème d’Airbnb depuis le 17 septembre

Cette année, la filiale d’Expedia est passée à l'offensive en employant la publicité comparative : elle cite explicitement Airbnb dans ses publicités et communiqués de presse. Cette tactique de challenger est fondée sur la notoriété : Vrbo, moins connu, mise sur l’excellente visibilité de Airbnb.

  • "Les propriétaires gagnent plus sur Vrbo que sur Airbnb"* est l’argument n°1 ouvertement utilisé. Les hébergeurs qui ont rejoint Vrbo en 2020 ont gagné en moyenne près de 6 000 dollars par hébergement (5160 euros), soit 50 % de plus qu’avec les autres OTAs; d'après les affirmations de la plateforme.

  • "Vrbo est meilleur pour réserver de grands hébergements" (et accessoirement de luxe), clament ses managers,

  • et de décliner, ainsi de suite, "Vrbo peut attirer les familles", "Les clients de Vrbo sont plus aisés" et, "La durée de séjour est plus importante sur Vrbo". Ainsi, selon Vrbo, le propriétaire qui "limite" sa distribution à Airbnb se prive des familles, qui dépensent plus de deux fois plus. Cet argument massue aurait de quoi convaincre.

Autant d'affirmations qui seront probablement contrées par Airbnb dans les prochaines semaines ...

La vidéo de promo "Are you hosting with the best site?" est parfaitement claire à ce sujet.

Le 17 septembre est une date importante : Vrbo, qui a décidé de piocher dans la corbeille du voisin avec son programme "Fast Start" dès le mois de mars aux US, a ouvert cette option en France, au UK et au Canada. Ce système attire les hôtes des concurrents, surtout de Airbnb.

Il augmente la visibilité des nouveaux hébergements au cours des 90 premiers jours de présence sur Vrbo, avec un badge "Nouveau sur Vrbo" ou "Nouveau sur Abritel". Les adresses sont valorisées par les avis déposés sur les autres OTAs.

L'objectif de Vrbo est d'attirer des hôtes Airbnb performants qui génèrent des revenus intéressants et souhaitent diversifier leurs sources de réservation. Cette stratégie repose sur le prélèvement de pépites parmi le capital d’hébergements accumulé par "Ze" concurrent.

Pour être acceptés par le programme Vrbo Fast Start, les hôtes Airbnb doivent afficher une note de 4,5+ et avoir généré plus de 2300 euros l’année précédente. Vrbo promet une remontée dans les résultats de recherche, un soutien personnalisé et n’oblige pas le propriétaire à quitter Airbnb...

3. Booking permet aux hébergeurs d'importer facilement leurs paramètres Airbnb et Vrbo

Le programme Fast Start de Vrbo a sa part d’intervention manuelle, tandis que Booking tente d’instaurer une intégration souple et puissante, afin de polir son image d'inventeur d'innovations intéressantes.

D’ordinaire, annoncer un hébergement sur Booking exige un peu de temps, mais le parcours pour annoncer son Airbnb sur Booking a été simplifié au maximum : lorsqu'un usager enregistre un nouvel hébergement sur la plateforme, il peut obtenir des informations indispensables sur l‘annonce directement depuis Airbnb ou Vrbo : le nom de l’hébergement, des photos, des équipements, les commodités et le profil du propriétaire s’affichent.

Booking agrège avec gourmandise les offres de ses concurrents, qui assurent pour lui un précieux sourcing. Tout le monde trouve son compte dans cette imbrication qui n’a aucune raison de ne pas se développer vers d’autres OTAs.

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Ça va saigner ?

Entre Airbnb, Booking.com et Vrbo, marcher sur les plates bandes de l’autre ne s’effectue pas de façon grossière, mais cela constitue une tendance lourde. Sans se cannibaliser, ces OTAs sembleraient presque partager un même budget de Recherche et Développement (R&D), tant ils deviennent interdépendants au sein d’un même écosystème.

Leur jeu stratégique a sa part de férocité, les concepts pionniers finissent par devenir communs. Faire des prévisions est délicat, mais les positionnements sont désormais identifiés :

  • le long catalogue d’adresses Airbnb est plutôt unique, en particulier pour les propriétaires d’un seul logement,
  • Vrbo veut attirer les meilleurs d'entre eux,
  • tandis que Booking en tant qu’agrégateur des offres d’Airbnb et Vrbo, pour tenter de rafler la mise intégrale.

Les hébergeurs français et européens sont souvent actifs sur les trois plateformes car la multiplication des affichages augmente considérablement la visibilité. Cette présence est aussi la plus raisonnable, car l’enjeu des hébergeurs n’a pas changé : ne pas trop dépendre des stratégies des uns et des autres (surtout lorsqu’ils se disputent poliment !) et garder la maîtrise de sa distribution. En clair, ne pas mettre tous les oeufs dans le même panier ...

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