Les points d'intérêts préférés des voyageurs ne sont plus les "place to be" !

Les points d'intérêts préférés des voyageurs ne sont plus les "place to be" !

Les monuments du monde à forte renommée, considérés comme incontournables selon une vieille hiérarchie, sont désormais concurrencés par les lieux - moins célèbres - mais recommandés sur les classements divers. Envie d'éviter la foule ou de la jouer "pionnier", les voyageurs préfèrent l’originalité aux grands standards. Certes, ils veulent être libres de choisir où aller, mais ils ont aussi besoin d’être orientés, selon la dernière étude publiée par Arival.

Arival est désormais reconnu comme l'expert mondial dans le business des "Tours et Activités" associés au tourisme. Ce cabinet américain observe le marché depuis quelques années maintenant et parvient à forger des tendances que l'atomisation des acteurs et des usages (encore plus fort que dans l'hébergement, c'est dire ...) rend pourtant assez compliqué. Car la frontière entre tourisme (ce qui viennent dans une destination) et loisirs (ceux qui y vivent et consomment les loisirs locaux tout au long de l'année) est ténue...

Aussi, selon la dernière étude d'Arival, c’est quand même un changement radical dans la planification de la visite de monuments qui se fait jour depuis le début de la pandémie : l’imposition de réglementations et la modification de la carte du monde (touristique) débouchent sur une nouvelle vision, de nouveaux usages et, de la part des voyageurs, un autre regard sur l'offre de loisirs.

Le "prêt-à-porter" touristique est devenu lassant et de plus en plus de consommateurs de voyages veulent maîtriser leurs choix et jouir d’une liberté d’initiative importante. L'envie de sortir des sentiers battus, covid oblige, semble donc installée durablement.

Selon Arival, depuis 2019, de plus en plus de personnes ont envie de visiter des sites qu'elles ont toujours voulu connaître (nous en parlons plus bas). Pas forcément, les grands "points d'intérêt" de telle ou telle région, mais ces lieux inédits présentés au détour d'un blog, d'une photo Insta, d'un article de la presse magazine. Se projeter, s'imaginer en situation, dans des lieux originaux et loin de la foule semble s'imposer dans l'esprit d'une majorité de voyageurs.

Ce grand changement est le fruit de 20 ans d’internet, qui a repoussé les frontières du possible et a fourni aux habitants du monde une liste des destinations "à faire" plus importantes que jamais. Par exemple, la liste des "Sept Merveilles du monde" (antique), la statue de la Liberté et autres sites célébrissimes, passages obligés des voyageurs aboutis (et aisés) des années 1970 ou 1980, est fortement reléguée au rang des cartes postales. L'envers du décor étant, bien souvent, une masse informe de voyageurs et de files d'attente sans fin.

Autre phénomène rejeté par une part grandissante de voyageurs: l’ultra-célébrité de certains lieux - qui conduit à la surfréquentation - aboutit aussi à l’absurdité de ces millions de posts, de stories, etc ... où les voyageurs y font strictement tous la même photo, postée sur Instagram.

L’originalité qu’ils recherchent est alors transformée en banalité, pour cause de mimétisme de masse. Cruel réseau !

L'atomisation des destinations à "faire"

En 2022, la question pourrait être "Visitez un monument, oui, mais pourquoi ?". En effet, le néo-voyageur s’intéresse davantage à ce qui est recommandé de façon générale par les autres, via les classements, listes, palmarès régulièrement publiés dans la presse spécialisée et généraliste. Et si possible, celui concernant des lieux originaux. Un exemple ? En Dordogne, l'incontournable est Lascaux, mais de plus en plus "d'influenceurs" recommandent les "petites grottes privées" où le propriétaire vous attend au détour d'un virage, vous conduit dans la forêt et, sous quelques mètres de terre et de granit, vous fait découvrir "sa" grotte et les histoires pittoresques qui vont avec. Fini la foule et bonjour l'expérience privée, inédite et très originale !

Bien sûr, l'un n'empêche pas l'autre, mais ce qui est nouveau du fait de ces classements et de ces "influences", c'est que l'alternative (qui a toujours existé) est désormais à la portée de tous et, surtout, de tous ceux qui cherchent à sortir des sentiers battus.

Car la valorisation sociale de soi, liée à l’étalage de ses voyages vers les lieux classiques "qu’il faut avoir fait", est progressivement remplacée par une capacité à découvrir des lieux alternatifs. C'est un peu comme le vin: soit on boit du "conventionnel", soit l'on donne dans le "nature", la "biodynamie", etc ... tout ce qui permet de raconter quelque chose en plus et qui sort de "l'ordinaire". Encore une fois, l'un n'excluant pas l'autre ...

Ainsi, il n’est pas exagéré de parler d’atomisation du monde, ce qui révèle que la façon d’appréhender le tourisme planétaire a été contrainte pendant un longue période. Que ce dernier a été dominé par la connaissance des lieux qui faisaient parler d'eux dans les grands guides, qui pouvaient se payer du marketing à outrance, etc ... Désormais, faire connaître sa singularité quand on est une "petite structure originale" est à la portée de tous grâce au digital.

Ce phénomène est donc durable et devrait avoir les mêmes effets que dans la gastronomie et l'hôtellerie. Les restaurants étoilés ont encore un certain intérêt, surtout en France, mais les autres critères de notation et d’appréciation (TripAdvisor en tête ou les guides alternatifs comme "Le Fodding" racheté par Michelin ou encore "Raisin") ont rebattu les cartes d’un vieux monde qui, tout simplement, était basé sur le "papier" avec son lot d'espaces et de moyens limités. Depuis l'apparation du web (sans limites de place et actualisable tellement plus rapidement !), l’ancien régime qui faisait autorité (parfois de façon autoritaire) est condamné à se réinventer. Notre article "Les étoiles hôtelières ont filé" revient sur cette importante transformation.

Lire aussi :
Guy Raffour: "Chaque territoire possède sa chance de succès touristique"

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Les voyageurs reprennent le contrôle

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Le nouveau rapport d'Arival, inclus dans sa série "Traveller Path to Purchase, Cultural Sites & Monuments" (Parcours d’achat du voyageur, sites culturels et monuments), examine à quel point les attitudes des voyageurs ont changé pendant la pandémie.

On y apprend principalement que, sous l’effet du Covid, les visiteurs sont davantage portés par les canaux traditionnels, tels que les recommandations d'amis et de la famille et les informations des guides, magazines et journaux, que l’imaginaire classique qui entoure les "grands" sites et monuments.

Arival, spécialisé dans la création d’expériences dans les destinations, a interrogé 1000 voyageurs aux sujets de leurs projets de voyages pour les 12 prochains mois. Ces consommateurs, âgés de 18 ans et plus, sont considérés "actifs" car ils ont effectué au moins un voyage (avec nuitée) à 160 km de chez eux depuis janvier 2019. Ils ont effectué une visite, ont pratiqué une activité ou se sont offert une attraction lors de leur séjour. Ces voyageurs "frais" prévoient de revoyager d’ici juin 2022, ils sont donc un public de choix.

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L’étude précise que le critère de prix était situé à 12% en 2019.

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Une chance pour Montpellier, la Bourgogne et toute la France !

Ces tendances révélées par Arival sont confortées par d'autres études, conduites par d'autres "grands noms" du voyage en ligne. Ainsi, Booking a confirmé dans ses "destinations-tendances" que les 8 premières destinations n'étaient pas (plus ?), par exemple, des capitales.

Et oh surprise ! La liste des 8 destinations mondiales les plus tendances en 2022, publiée en novembre par Booking (étude "Travel Predictions"), contient Montpellier en n°8.

    1. Taichung, Taïwan
    1. Melaka, Malaisie
    1. Atlanta, États-Unis
    1. Pelouse, Brésil
    1. Santo Domingo, République Dominicaine
    1. Brasov, Roumanie
    1. Llandudno, Pays de Galles
    1. Montpellier, France

Il n’est pas inutile de consulter les atouts et arguments qui composent la promo planétaire de la capitale de l’Hérault, par Booking : "Considérée comme l'une des villes les plus ensoleillées de France, Montpellier se trouve sur la côte méditerranéenne du sud de la France et est une belle ville pleine d'architecture élégante. Explorez la ville grâce aux nouvelles lignes de tramway modernes conçues par le designer de luxe Christian Lacroix, puis visitez les plages de sable blanc aux portes de la ville pour une mer vitaminée car 82% des voyageurs conviennent que voir un plan d'eau change instantanément leur humeur pour le mieux". Voilà, selon Booking et ses clients ce qui justifie que Montpellier s'impose face aux autres grandes villes françaises du Top40.

Dans ce cadre alternatif (où l'on ne voit pas New-York, Paris ou Tokyo…), l’OTA précise que:

  • 63% des voyageurs ont "besoin de rattraper le temps perdu en vacances à cause du Covid".
  • 47% préféreraient une destination dont la plupart des gens n'a pas entendu parler, plutôt qu’un lieu bien connu, dont ils pourraient parler (se vanter ?) en 2022.

Idem, le Top 10 Lonely Planet des pays, villes et régions où se rendre en 2022, publié fin octobre, positionne la Bourgogne en n°10, sur une liste où elle rivalise avec Porto Rico…

    1. Westfjords, Islande
    1. Virginie-Occidentale, Etats-Unis
    1. Xishuangbanna, Chine
    1. Côte patrimoniale du Kent, Angleterre
    1. Porto Rico
    1. Shikoku, Japon
    1. Désert d'Atacama, Chili
    1. Scenic Rim, Australie
    1. Île de Vancouver, Canada
    1. Bourgogne, France

Là aussi, point de "zone-capitale" dans le Top10, mais des régions touristiques qui émergent au plan mondial et qui ont réussi la mue (ou la fusion) avec d'autres images fortes comme le vin, pour la Bourgogne.

La performance bourguignonne en dit long sur l’ouverture du monde et la chance offerte à des sites, lieux, villes, régions, qui sont aptes à égayer un tourisme fatigué de tourner en rond (même sur le cercle est quand même grand !).

La percée mondiale de Montpellier et de la Bourgogne fournit un formidable espoir pour l’ensemble des territoires de France (villes, villages, terroirs, micro-régions) moins connus que le Mont-Saint-Michel, le Bordelais ou Paris.

Inimaginables avant Internet, ces deux classements, parmi des dizaines d’autres régulièrement publiés, soulignent que la roue tourne pour tous et que chaque lieu d’intérêt peut avoir sa chance grâce au digital et "l'influence massive" qu'il permet de générer. D'où l'investissement massif des destinations sur les réseaux sociaux.

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Le Morbihan (partenaire elloha) se classe 1er département français sur les réseaux sociaux sur le baromètre WeLikeTravel

Photo by le Sixième Rêve / Unsplash

Une chance supplémentaire pour les hébergeurs

Si de tels lieux existent près de votre hébergement, pourquoi ne pas en devenir vous-même les "influenceurs" ? Si vous sentez une aspiration croissante des guides, des voyageurs, des bloggeurs ... pour tel ou tel lieu "secondaire" près de chez vous, saisissez la balle au bond et intégrez-le dans votre propre site et sur vos supports de communication, à commencer par votre site et vos réseaux sociaux !

Si ces lieux progressent en notoriété (comme les bons vins), n'attendez pas qu'ils soient devenus très célèbres: positionnez-vous comme un de ses "premiers défenseurs" et, surtout, donnez un maximum d'informations pratiques à sonn sujet. Il est plus-que-certain que si le lieu augmente sa notoriété, les requêtes sur internet à son sujet soient de plus en plus nombreuses et donc, si votre site est positionné dessus, que ces dernières aboutissent plus souvent chez vous !

Si vous êtes un hébergeur, dans votre rôle de promoteur de destinations pour voyageurs désireux de s’épanouir autrement, vous devez, vous aussi, voir une opportunité en or dans les désirs de voyages hors des sentiers battus… voire un appel d’air.

Après l’époque du tourisme standardisé, avec ses figures imposées, une abbaye dans le Cantal, un vallon normand, ou le quartier attachant d’une ville de Moselle vont-ils séduire davantage que les Chateaux de la Loire ? Dans tous les cas, on peut assister en France à un glissement... comme en Allemagne, où la visite de Düsseldorf est devenue plus branchée que celle de Berlin

Le rapport d’Arival invite à rester en veille sur cette tendance, jusqu’à déployer des stratégies marketing appropriées : en vantant les sites et monuments (mais aussi curiosités) proches de chez eux, les hébergeurs pourront capitaliser en nuitées l’intérêt qu’ils auront suscité. Il ne sera pas question d’inventer la célébrité de lieux, mais d’élargir la palette de divertissement pour des voyageurs qui ne veulent plus faire comme les autres. Et cette tendance s'inscrit irréversiblement dans la durée...

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