Les locations de vacances captent 20% du marché des "professionnels"

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La parution, cette semaine, de la dernière étude Insee a fait grincer beaucoup de dents. Elle y évalue de manière précise l'impact de cette "nouvelle concurrence" chez les professionnels de l'hébergement. Avec une croissance annuelle de 15%, cette concurrence portée par des sites comme AirBnB, HomeAway ou LeBonCoin oblige les hébergeurs traditionnels à changer de rythme et de stratégie en permanence ...

Les temps sont durs ... en ce début d'été 2019, beaucoup d'hébergeurs s'inquiètent: leur planning reste encore perforé de quelques trous qui laissent augurer une occupation moindre que l'an dernier. Pas seulement en juin, mais aussi en juillet et en août. Heureusement, tout n'est pas perdu et, plus important encore, des explications rationnelles existent. Sans être totalement rassurantes, ces raisons permettent de mieux comprendre le contexte extraordinairement changeant du marché du tourisme et, surtout, l'absolue nécessité de s'adapter en permanence à défaut de se remettre en question totalement.

Selon l'Insee, les locations de vacances tirent l'activité vers le haut

Cette semaine, l'Institut National (français) de la Statistique Economique publiait son étude sur l'impact des locations de vacances (et leurs plateformes telles AirBnB, LeBonCoin, etc ...) sur le marché du tourisme. Selon ces spécialistes, les locations de vacances représentent désormais 14% de la fréquentation touristique locale et 20% des nuitées consommées en France en 2018 (tous types d'hébergements confondus, y compris les hôtels). Mieux ! En 2018, ce marché a connu une croissance insolente de 15,5% ... Pour mieux en prendre la mesure, l'an dernier, les nuitées "achetées" chez les particuliers ont représenté un volume de 36 millions d'unités ...

Certains diront : "Et c'est donc autant de nuitées en moins consommées en hôtels et en maisons d'hôtes ..." ce qui n'est pas totalement faux ... mais pas totalement vrai non plus, car avec cette offre plethorique, les locations de vacances "à bon prix" ont aussi incité plus de voyageurs à voyager et à réserver une "location" dans une des destinations hexagonales : selon l'Insee, la croissance du tourisme français aurait doublé passant de 1,7% de croissance, il a 2 ans, à 3,4% en 2018.

Pour autant, cette arrivée de "nouveaux clients" aurait un côté bénéfique et éducatif et inciterait les voyageurs qui commencent par une location de vacances à passer, par la suite, vers des services plus "hôteliers" comme la maison d'hôtes, le camping ... et, bien évidemment, l'hôtel. Mais ce qui inquiète le plus les "pros" du tourisme reste quand même l'arrivée massive de nouveaux concurrents (voir plus loin).

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Une concurrence plus qu'aiguisée !

Il est vrai qu'en économie, c'est bien l'offre qui crée la demande et donc, comme l'ont constaté les économistes de l'Insee, l'arrivée de nouvelles locations de vacances sur le marché aurait l'effet "bénéfique" d'inciter de nouveaux clients à séjourner en France. Mais, cela représente surtout une offre pléthorique en constante progression ... Si bien qu'un hôtelier ou une maison d'hôtes établi depuis des années sur une destination donnée se voit désormais littéralement "encerclé" par des concurrents d'un nouveau genre. Et cela n'est pas sans impact sur sa propre exploitation :

  • les clients ont plus de choix et se décident de plus en plus tard,
  • la stratégie tarifaire des logements "AirBnB" perturbe la logique tarifaire de saison des établissements "marchands": certains propriétaires déclarent carrément "perdre le nord en matière de tarification".
Cette étude de l'Insee montre l'appétit grandissant des français (résidents) pour les locations de vacances sur les plateformes. Ce phénomène crée autant de nouvelles opportunités de marché que de concurrence.

Une croissance qui se tasse mais reste tonique

Même si l'Insee révèle un tassement de la croissance des nuitées en locations de vacances (+15% en 2018 contre +25% en 2017), ces nouveaux entrants vont s'installer durablement sur le marché pour au moins, trois raisons évidentes :

  • les plateformes mobilisent des moyens considérables pour "conquérir" de nouvelles offres et donc, attirer à elles de nouveaux propriétaires désireux de se vendre sur leurs sites. Il n'y a pas, en effet, seulement AirBnB ... Des acteurs comme Booking ou LeBonCoin ambitionnent de s'imposer sur le marché et donc, pour cela, mènent une véritable "course à l'armement" en se ralliant un maximum de propriétaires et de concierges (Lire aussi:Booking plus fort qu'AirBnB dans les locations de vacances)
  • le marché des locations de vacances est encore celui qui reste le moins "digitalisé": plus de 80% des propriétaires sont encore "sous les radars" et, contrairement à un hôtel, un gîte ou une maison d'hôtes ... ne sont pas encore équipés pour aller se vendre en ligne et se distribuer sur les grandes plateformes. Mais, cela ne vaut que pour aujourd'hui. A une très grande vitesse, ces particuliers adoptent des technologies nouvelles et "débarquent" sur le marché dans les mêmes conditions que les pros; ce qui laisse augurer d'une arrivée spontanée d'une lourde concurrence supplémentaire dans les prochaines années...
  • les habitudes de consommation changent: on ne le répétera jamais assez, un client de maisons d'hôtes ne part plus exclusivement qu'en maisons d'hôtes ou, idem, en hôtel, etc ... Durant une année, un client peut vouloir partir dans des lieux et des hébergements de types différents et donc, zapper, sur des offres de nature différente. Selon Booking, par exemple, 40% des clients qui ont réservé une location sur son site sont prêts à réserver un hôtel la fois suivante et vice-versa ...

Une décision de justice qui en dit long sur le futur

L'autre paramètre de cette "concurrence" que certaines municipalités souhaiteraient encadrer tient également au contexte juridique et réglementaire dans lequel elles evoluent. Pour l'instant, sous la contrainte de réglements locaux divers, des plateformes comme AirBnB font "profil bas" et ne pressent donc pas le marché plus que de raison.

Toutefois, si dans quelques mois la Cour de Justice Européenne suivait les conclusions de son avocat général, Maciej Szupunar - qui a déclaré qu'AirBnB devait être considérée comme un "service de la société de l'information" et non comme un fournisseur de logements - il y a fort à parier que cette dernière aurait les mains encore plus libre pour développer son concept tous azimuts.

En effet, selon toute vraisemblance et si la Cour suivait son avocat général comme elle le fait dans 80% des cas, AirBnB devrait être soumis aux dispositions de l'UE relatives à la libre circulation de l'information, plutôt que régie par des règles conçues pour l'industrie du voyage ou de l'immobilier, par exemple.

S'adapter en permanence ... ou faire autre chose

Ce n'est pas facile à admettre, mais comme le montre l'étude de l'Insee (qui confirme très certainement votre vécu si vous êtes un pro de l'hébergement) le marché a subi des mutations aussi profondes que rapides ces trois dernières années.

On ne peut plus donc agir comme si de rien n'était ou, pire, comme si tout était condamné. Comme si cette nouvelle concurrence de "particuliers" allait définitivement pousser les "pros" vers la sortie. Heureusement, (et c'est de circonstance), le soleil brille pour tout le monde et les mutations touchent autant l'univers de l'offre (hébergeurs) que celui de la demande (les clients). L'adaptation est donc plus-que-vitale car l'environnement change à une vitesse inédite:

  • les clients réservent de plus en plus tard car l'offre est pléthorique (et le risque de pénurie de logements, nul) et qu'ils savent pouvoir bénéficier de meilleurs prix jusqu'au dernier moment,
  • leurs goûts sont changeants et ils cèdent plus aisément aux prescriptions des OTAs: je peux me rendre sur Booking pour réserver un hôtel et repartir avec une maison d'hôtes ou une villa en bord de mer, etc ...
  • les critères de choix se multiplient à l'infini: l'emplacement, l'hospitalité, le prix bien sûr, les promotions (vraies ou moins vraies), les avis et les photos, la recommandation d'un guide ou d'un influenceur, ou les deux ... il est difficile pour un hébergeur de privilégier un facteur de réservation plutôt qu'un autre. Donc, il faut tous les mener de front à la fois !
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Tout cela est difficile surtout lorsque l'on est un hébergeur professionnel et que l'on doit quasiment tout faire chez soi; c'est évident. Mais cela est désormais vital avec, par ordre de priorité :

  • se rendre visible sur les OTAs,
  • avoir un site et un moteur de réservation dignes de ce nom pour s'approprier le maximum de réservations directes,
  • surveiller en permanence sa e-reputation car elle peut vous faire perdre de 1 à 4 réservations par semaine,
  • avoir une politique de prix variés et agiles pour vous adapter en temps réel aux soubresauts du marché et d'une concurrence qui ne motive pas ses prix selon les mêmes critères qu'un pro ...