Les "notes éco" des voyageurs moins "durables" ?
Et si vos efforts de durabilité passaient inaperçus ? Au point même que vos concurrents qui en font moins que vous se voient récompensés à la même hauteur que vous ... Injustice ? Non, selon une étude publiée ce 4 novembre, les "notes eco" données sur les plateformes reflètent plus la qualité de l'expérience générale que vos efforts de durabilité. Ce qui n'est pas une raison pour vous arrêter en si bon chemin ...
Imaginez ... Vous avez investi dans une source d’énergie renouvelable pour votre établissement (panneaux sur le toît, géothermie, etc), vous avez supprimé les plastiques à usage unique, privilégié les producteurs locaux ... vous affichez même fièrement vos engagements durables en ligne. Et pourtant, lorsque vos clients quittent votre établissement, la note en lien avec l'avis, lui-même en rapport avec votre mention "éco‑friendly", reste moyenne.
En clair, en termes de retours-clients, vous êtes quelquefois relativement loin de ce à quoi vous vous attendiez … Ce constat frappant a été livré par Xavier Font, un professeur de marketing de la durabilité à la University of Surrey, dans une étude parue - le 4 novembre dernier - sous le titre "Perceptions versus Performance in Hotel Sustainability", elle-même réalisée sur les données d’Expedia et Booking.com.
L'étude croise les notes "éco" post-séjour données par les clients sur Expedia tandis qu'elle s'appuie sur les données de durabilité (auto-déclarées et certifiées) disponibles sur Booking.com.


Le phénomène du halo : une note qui dépend avant tout du séjour global
L’analyse menée par Xavier Font a porté sur 6 696 hôtels dans les 100 plus grandes villes mondiales. Résultats :
- la satisfaction des clients explique quasi‑intégralement les notes "éco‑friendly".
- les pratiques de durabilité (énergie renouvelable, certifications, etc.) et les labels "verts" contribuent très peu, en fait, à la note "eco".
Autrement dit : si le client a passé un bon séjour, il attribuera une bonne note "éco" même s’il n’a pas du tout été sensibilisé aux actions durables de l’établissement. En clair, seul le score de satisfaction est prédictif de la note "éco". C’est le fameux effet "halo".
Selon des calculs très savants, le chercheur a même approfondi si ces (non) influences différaient selon le fait qu'un hébergement était préalablement certifié (par un organisme extérieur) ou s'il s'était auto-certifié, s'il appartenait à une chaîne (dans le cas d'un hôtel) ou s'il était indépendant ... sans noter de réel impact. Dans ces cas aussi, la note "eco" dépend, avant tout, de la note globale attribuée à la qualité du séjour dans toutes ses dimensions. Non, mais "halo" !
Un écart entre la perception et la réalité
Pour l'auteur de l'étude, ce décalage – entre ce que les établissements ont conscience de faire réellement et ce que leurs clients en perçoivent – pose trois problèmes majeurs :
- Les hôtels qui font vraiment le travail ne sont pas nécessairement reconnus pour cela,
- Les clients peuvent penser qu’ils ont fait un choix "vert" alors que ce n’est peut‑être pas le cas ...
Le malentendu peut être tel que les plateformes (OTAs) et les régulateurs (autorités publiques) risquent de se reposer sur des signaux (notes "éco ") qui ne mesurent pas réellement ce qu’ils prétendent mesurer. C'est dire si les débats et les conférences consacrés à la "durabilité" sont relativement restés "lettre morte" ...
Le contexte réglementaire pousse les labels à évoluer
Autre point mis en avant dans l'étude, le cadre règlementaire est lui aussi en mutation car, jusqu'à présent la jungle des certifications et des labels locaux, nationaux, thématiques, etc ... a largement contribué à brouiller toujours un peu plus les pistes d'une compréhension spontanée de part et d'autres. C'est pourquoi, la directive européenne sur "l’autonomisation des consommateurs pour la transition verte" impose désormais que les affirmations environnementales soient vérifiables. Autrement dit, que les hôtels et les plateformes seront de plus en plus obligées d'aligner leur discours (et leurs labels) avec des preuves réelles, au‑delà du simple badge "écologique ".

Ne pas lâcher l'affaire
Les voyageurs restent, cependant, en demande d'efforts "durables" de la part des professionnels et leur croyance en tel ou tel label reste des plus "relatives". Et puis, c'est aussi le sens de l'histoire. Aussi, si tel est le cas, pensez à valoriser vos actions tangibles que vos clients plus-que-nécessaire afin que vos clients puissent vraiment les voir (ex. : panneaux explicatifs, bornes de recharge, verres réutilisables, etc), intégrez ces actions à un maximum d'étapes de leur expérience client (à l’arrivée, dans la chambre, à l’accueil) et donnez des preuves formelles à travers des photos ou des vidéos que vous utiliserez sur vos principaux canaux de communication pour créer un impact visuel fort.
Les "bonnes pratiques" possibles sont nombreuses, telles que les a identifiées l'auteur de l'étude:
- Au check‑in : mentionnez brièvement , par exemple: "Voici ce que nous faisons pour l’environnement, et comment vous pouvez participer",
- Dans la chambre : laissez un petit visuel ou un livret "Notre établissement et vous : agir ensemble pour la planète ",
- Au check‑out ou via un email de remerciement : rappelez vos engagements, et invitez-les à parler de leur expérience "éco",
- Enfin, utilisez un langage simple, concret, avec "vous/ensemble", et non uniquement des mots techniques.
Enfin, ne négligez pas la certification ... qui reste un atout utile (par exemple, pour les acheteurs corporate, les marchés B2B). N'oubliez pas, cependant que seule, elle ne suffit pas à faire remonter la note "éco " de votre établissement. Le mieux reste donc de l'associer à des histoires : "Grâce à ce label, nous avons réduit de X % notre consommation d’eau depuis 2024" ou encore de l'utiliser comme une preuve de crédibilité que vous devrez mettez‑la en scène auprès de vos clients.
Boostez votre score "eco" sur les OTAs
Si vous travaillez avec les OTAs, n'hésitez pas à "aller au‑delà de leurs propres badges". Comment ? N'affichez pas seulement des mentions comme "Label écologique obtenu", mais créez un paragraphe dans votre descriptif sur le thème "Ce que fait notre hébergement pour la planète". Conservez l'évolution de vos notes "éco" comme pour leur donner du sens, et faire mesurer vos efforts à vos clients. Enfin, pour les "puristes", montrez que vous travaillez main dans la main avec vos clients (ils adorent l'expression "ensemble pour la planète") . Cela vous permettra de mieux aligner les questions posées à vos clients (ou leurs suggestions), les critères de durabilité sur lesquels vous travaillez en priorité, et la manière de les afficher pour plus de cohérence.
En conclusion, l'étude démontre que les efforts ne sont pas forcément salués à leur juste valeur et que, dans le sens inverse, des établissements pas forcément très durables parviennent à obtenir de bons scores "eco", principalement, grâce à la qualité globale de l'expérience qu'ils proposent. Pour une meilleure reconnaissance, vous devez donc transformer la durabilité en expérience visible et mémorable pour vos clients. Et ne pas oublier que, certes, la certification compte, mais qu'elle doit être largement exposée dans votre communication et lors de l’expérience vécue, sur place, par vos clients. Au risque d'être non seulement imperceptible mais aussi ... mal récompensée.

