L'IA départage voyageurs et entreprises touristiques
Selon que l'on soit voyageur - ou un de vos clients - ou un professionnel du tourisme, l'adoption de l'IA (ou des outils à "base de") marque des différences notables ... au profit des voyageurs pour lesquels l'IA est en train de devenir un parfait assistant de leur prochain voyage.
Dans la majeure partie des cas (71%), les voyageurs citent l'IA comme l'outil le plus utile "pour trouver des activités ou des attractions à faire sur place".
Et pour cause ! Comme cela fut discuté la semaine dernière, à NYC, lors du Skift Global, ==l’intelligence artificielle à une véritable pouvoir de contribuer à accélérer la mise en avant des expériences touristiques car, à la différence des hébergements que l'on peut trouver facilement sur à peu près tous les OTAs, les attractions disponibles sur une destination restent compliquées à identifier à distance: ce qui explique, probablement, que seule la moitié des réservations d’expériences se font en ligne, en partie parce que ce marché est dominé par un très grand nombre d'entreprises de taille modeste qui ne sont pas encore aussi bien digitalisées que les hôtels, les campings et les maisons d'hôtes. D'où le recours à l'IA pour les trouver plus facilement ...
Selon, Jules Seeley de McKinsey, "la technologie et l’IA peuvent aider le client à s’orienter dans ce domaine très atomisé. Je pense que la possibilité de proposer, par le biais de plateformes et d’intermédiaires, un certain niveau de sélection, de personnalisation a une valeur incontestable dans ce domaine conjugué de l'IA et des attractions touristiques ...".
Mais la recherche d'attractions (plus difficilement identifiables que les hébergements) n'est pas le seul attrait de l'IA. Selon l'étude de Matador Network, en second lieu, l'intelligence artificielle serait perçue par les voyageurs comme un précieux renfort pour "gagner du temps lors de la planification du voyage" (57,8%) ou encore pour "les aider à trouver de nouvelles destinations intéressantes" (39,6%). Ces trois indications sont le résultat d'une récente enquête conduite par Matador Network, l'un des éditeurs de guides touristiques les plus prolifiques de la planète.
40% de plus que l'an dernier
Le recours à l'IA par les voyageurs relève donc d'une adoption plus-que-tonique puisque, s'ils n'étaient que 16% à l'utiliser pour la préparation de leurs séjours et voyages en 2023, ils sont 22,8% depuis le début de cette année et ils seront probablement plus de 34% à le faire d'ici à l'année prochaine ! L'IA risque donc - dans les différentes déclinaisons des services proposés - de devenir un prescripteur incontournable du voyage, une sorte d'office de tourisme "universel" qui sait presque tout sur tout et qui peut renseigner de manière pertinente chaque type de voyageur et de demandes ... à condition qu'elles soient bien formulées. Car, pour l'IA, on le sait désormais, c'est bien le "prompt", c'est-à-dire le message d'interrogation qui fait toute la différence et donc, la qualité de la réponse proposée.
La plupart des moteurs d'IA que nous avons interrogés sur des destinations françaises "sourcent" de nombreux sites touristiques au premier rang desquels TripAdvisor et, s'agissant des activités, les sites de réservation d'attraction (getyourguide, funbooker, etc). Arrivent ensuite les sites de la presse locale ou les blogs d'agenda culturels; les sites "locaux" comme la mairie ou l'office de tourisme n'arrivant qu'en 6ème et 7ème position des "sources" revendiquées par les principaux "portails" d'IA. On notera souvent, aussi, que les moteurs d'IA bâtissent leurs réponses en recensant les contenus rédactionnels présents sur les sites des principaux hôtels de la ville ou encore des opérateurs d'attractions eux-mêmes ! Un conseil, si vous êtes un de ceux-là, musclez donc le contenu de vos sites (et tenez-les parfaitement à jour) pour pouvoir être identifié comme une bonne source de recommandations locales et, ainsi, pouvoir mettre en avant votre propre établissement dans les résultats générés par l'IA. Pour certains, même, il n'est pas interdit de rêver y percer plus vite que sur Google lui-même (les fameux "premiers résultats" ...).
Les pros à la traîne ... des voyageurs
L'IA commence donc à "faire son trou" dans l'univers du voyage et à devenir un carrefour incontournable pour une part croissante de voyageurs: si la recherche de renseignements touristiques est la première motivation, 23,5 % d'entre eux ont quand même déclaré que l'IA les avait aidés à ajuster leurs plans et 22,2 % ont déclaré que l'IA les avait aidés à respecter leur budget ... Autant dire que l'on peut discerner assez facilement la gamme de motivations qui conduit vos clients à consulter l'IA et donc, votre entreprise à y positionner les bonnes réponses pour en capter les meilleurs retours possibles.
Cependant, beaucoup de professionnels du tourisme n'en sont pas encore au même stade de découverte et de pratique que les voyageurs. Cela n'est ni étonnant, ni bloquant: "se mettre à l'IA" suppose de prendre beaucoup de temps pour espérer d'en tirer un retour sur investissement significatif. L'attentisme est donc encore la position la plus couramment partagée.
Dans le même temps, s'agissant des "grandes compagnies touristiques", il n'est pas rare, ces derniers temps, de lire de nombreuses annonces selon lesquelles l'IA intègre désormais toutes leurs activités: que ce soit pour augmenter la satisfaction des clients, offrir de nouveaux services, améliorer les réservations ou pour toute autre raison. Ces initiatives sont donc, avant tout, le fait de "précurseurs" et, à juste titre, les entreprises de taille plus modeste continuent de parfaire leur connaissance du phénomène sans pour autant passer aux tests grandeur nature forcément chronophages et potentiellement coûteux.
Leur attentisme est souvent motivé par la "mauvaise publicité" faite à l'intelligence artificielle comme les fameuses "hallucinations" qui se produisent lorsqu’un outil d’IA générative crée des réponses à des questions qui n’ont que peu ou pas de fondement factuel. Les réponses biaisées ou inexactes restent donc un problème courant, et certains modèles d’IA présentent des défauts de conception qui peuvent amplifier ces problèmes. Pour éviter leur prolifération, des contrôles nombreux et plus approfondis des systèmes d’IA sont nécessaires; des opérations nombreuses que les opérateurs touristiques de taille modeste n'ont pas forcément les moyens de conduire.
L'IA ne devant pas être considéré comme "un logiciel de plus" pour l'exploitation de votre entreprise touristique, leur mise en place requiert une grande prudence: ces systèmes sont souvent opaques et manquent de documentation ou d’explications. Et, à ce stade, il n'est pas exagéré d'affirmer q'un système d’IA fonctionnel comporte encore des risques de non-respect des lois, de divulgation involontaire d’informations personnelles et commerciales et de divers dilemmes éthiques. Même identifiés, ces risques restent relativement difficiles à gérer.
Pour l'heure, pour de nombreux entrepreneurs du tourisme, même si les outils d’intelligence artificielle devraient transformer leur façon de travailler (automatisation de certaines tâches, amélioration de la prise de décision sur les prix, par exemple, ou encore la capacité à fournir des informations précieuses aux clients en mode "automatique", etc), l’utilisation d’outils d’IA constitue encore de nouveaux défis en termes de sécurité de l’information et de protection des données que de nombreuses entreprises ne sont pas encore préparées à affronter.