Les leçons à retenir de l'aérien

Les leçons à retenir de l'aérien

De tous les secteurs du voyage impactés par la digitalisation, celui de l'aérien est certainement le plus ancien et celui qui, en permanence, s'interroge le plus souvent sur les évolutions à orchestrer. Dans sa dernière étude, le géant Travelport détailles les nouveaux usages des voyageurs et leur probable transposition dans les univers de l'hébergement touristique et des loisirs ...

L'aérien doit beaucoup au digital ! Avant même qu'internet n'existe, une grande partie de son expansion s'est faite grâce à l'informatique. Les GDS (Global Distribution System ... comme Amadeus, Sabre et Travelport) ont été créé, dans les années 60, pour répondre à l'explosion du trafic et aux besoins de mieux fluidier la vente de billets d'avion et la gestion des flux des clients. Depuis, de nombreuses technologies sont apparues et ont irrigué tous les secteurs du tourisme pour accompagner ce besoin vital de se digitaliser pour pouvoir traiter encore plus de flux (d'offres, de prix, de clients) et se distribuer de manière plus intelligente.

Une des grandes tendances de ces dernières années pourrait se résumer à l'acronyme DTC - pour Direct To Consumer - ou, comment, pleinement profiter du digital pour éviter de trop lâcher de ses revenus à des distributeurs que sont les agences de voyages traditionnelles ou les OTAs. Ce mouvement a été enclenché par les compagnies aériennes (qui ont fait de leur site leur premier vendeur) et suivies, en cela, par les grandes compagnies hôtelières qui ont multiplié les initiatives pour que, là aussi, les voyageurs aient le réflexe de se détourner des grands sites (notamment, les OTAs) pour aller réserver "en direct" sur leur propre site. Cependant, se demande l'étude Travelport, cette tendance ne signifierait-elle pas non plus que l'on soit passé du Direct To Consumer au "Difficult To Compare" (de la vente directe à la difficulté de comparer) ? C'est, a priori, ce que révèle (et chiffre !) cette étude qui devrait inspirer plus d'un acteur (y compris, les producteurs indépendants de taille modeste) dans la réorganisation de sa distribution en ligne.

Selon ce rapport, "The 2024 Modern Retailing Report", dans le seul secteur de l'aérien, l'offre serait passée de 500 offres de vol à comparer (pour une combinaison de destinations données) à quelques 10.000 offres entre 2010 et 2024 ! "En conséquence, souligne le rapport, les voyageurs seraient passé de l'observation de 38 sites, en moyenne en 2013 avant de réserver, à 277 pages en 2024 !". La difficulté de comparaison, en lien avec cette abondance d'offres, serait donc aussi à l'origine d'un stress croissant chez les clients.

Nouveau call-to-action

Des choix plus complexes

Chez 56% des voyageurs, selon l'étude Travelport, les choix seraient tout bonnement devenus plus complexes, tout en étant conscients pour 42% d'entre eux, que cette profusion ne leur apportait pas non plus la garantie d'y trouver des offres vraiment personnalisées à leurs attentes.

Et pour cause, lorsque l'on parle de 10.000 offres pour un voyage (ou un "segment" de voyage donné), on peut se rendre rapidement compte qu'il s'agit d'offres répétées mais revendues, à l'envi, entre différentes agences en ligne ou tour-operateurs, ou encore des brokers, avec des conditions tarifaires légèrement variables mais reposant sur des conditions de voyages subtilement différentes: pour le même prix, une offre comporte la possibilité de prendre un bagage alors que l'autre non, une offre propose un "stop" de 1h30 alors que l'autre en impose un de plus de 8 heures, etc ... Difficile, dans ces circonstances de ne pas faire le "mauvais" choix au final.

Pour 58% des voyageurs, tous ces choix sont littéralement "écrasants" ! Au point qu'ils développent de nouvelles affinités avec le concept de "réservation hybride" où 54% d'entre eux démarrent désormais leur recherches des prix par un comparateur (les services de réservations de Google sont inclus dans cette liste avec Kayak, Trivago, etc) avant de se concentrer une fois pour toutes - et d'acheter ! - sur le site d'une compagnie aérienne, hôtelière, etc.

L'autre indicateur important qui ressort de cette étude et qui milite en faveur des tendances croissantes pour la réservation directe tient au fait que les voyageurs s'estiment mieux protéger en cas de modification ou d'annulation après avoir réservé directement auprès d'une entreprise touristique et ... non pas, un distributeur.

Nouveau call-to-action

Se rassurer sur les "pénalités

Selon l'étude Travelport, les voyageurs aériens privilégient les achats directs car les compagnies leur semblent plus ouverte (que leus intermédiaires) en cas de modification ou d'annulation de leur voyage ... et cette crainte vaut donc, aussi, pour les voyageurs qui réservent des nuitées ou des expériences en direct.

Le rapport révèle, en effet, que "par rapport à il y a 10 ans, 61 % des voyageurs reconnaissent également qu'il y a plus de pénalités pour effectuer un changement malgré l'utilisation de plateformes numériques en libre-service".

D'après l'étude Travelport, les voyageurs considèrent la réservation directe comme une possibilité de réserver une meilleure offre (une meilleure valeur, plus de souplesse) et comme celle de jouir d'une meilleure compréhension de l'entreprise touristique en cas de modification ou d'annulation.

En clair, "ils veulent que les détaillants rendent la modification d’un achat beaucoup moins onéreuse et complexe ! Après tout, soulignent les auteurs, vous bénéficiez d’un délai de réflexion lorsque vous achetez un iPhone, alors pourquoi pas un vol ? D'autant plus que les deux peuvent coûter le même montant. C’est un problème primordial pour 50 % des voyageurs aériens, mais 77 % d’entre eux disent que c’est la partie la plus difficile d’un voyage à modifier."

D'ailleurs, certaines agences ont déjà compris à quel point cela compte: Hopper, par exemple, qui fait fureur aux US, propose désormais une politique "d’annulation pour n’importe quelle raison" en lieu et place des compagnies aériennes ou comment, en plus du prix, faire des conditions d'annulation un argument de vente qui (re)détournerait les voyageurs vers les intermédiaires plutôt que vers les compagnies elles-mêmes.

Principales causes d'inquiétude lors de l'achat de voyages - Travelport 2024
Le Blog elloha: 7 internautes sur 10 ne sont pas en confiance pour réserver du voyage
Selon le blog du channel manager elloha, la dernière étude menée par Accenture met en avant la confusion qui s’installe chez les internautes, au moment de réserver, en raison de trop ou trop peu d’informations données au client.
Le blog du channel manager elloha : les voyageurs trouvent les paiements stressants
Selon le blog du channel manager elloha, près de 8 voyageurs sur 10 sont insatisfaits des conditions de paiements proposées par les professionnels du tourisme et des loisirs à la fois sur leur site et sur place.

Prenez les devants !

En conclusion, cette étude centrée sur l'aérien, ne doit pas vous laisser penser que votre entreprise n'est pas concernée par ces nouveaux comportements d'achats. Après le combat pour entamer des processus gagnants de reprise d'une proportion significative de réservations directes grâce à un meilleur prix (dis-parité tarifaire), il semble qu'un nouveau combat soit à mener en paralèlle avec la garanti d'offrir - depuis une réservation directe - les conditions les plus souples de réservation, de paiement ... de modification et d'annulation.

S'il est illusoire de voir l'offre pléthorique se résorber (après tout, une fois que vous avez ouvert vos inventaires à un OTA, vous ne maîtrisez plus s'il ne distribue que sur son site ou sur des milliers de sites affiliés), l'étude démontre bien la nécessité de toujours veiller "à proposer le meilleur (prix, conditions, descriptions, avantages sur place ...)" suite à une réservation directe sur votre site. C'est probablement sur ces sujets qu'il faudra aussi vous battre dès les prochains mois en vue des prochaines saisons.