Netflix va-t-il faire la pluie et le beau temps des destinations ?
Selon la dernière étude conjointe à l'OMT (Organisation Mondiale du Tourisme) et Netflix, la plateforme aux 213 Millions d'abonnés serait l'un des plus grands influenceurs touristiques de la planète. Idéal pour transformer une discrète destination en "Place To Be", Netflix n'ignore rien des goûts de voyages de ses abonnés...
Un site ou une ville transformés en plateaux de tournage (cinéma, séries) jouissent de retombées touristiques importantes. Netflix en tête, l’impact croissant des fictions sur les pratiques touristiques transforme ces contenus en macro-influenceurs. Le "ciné-tourisme" est capable de booster des lieux discrets ou pas du tout branchés. Son impact a doublé depuis 5 ans.
Le marketing de destinations repose, pour partie, sur les efforts déployés par les DMOs (Destination Management Organizations ou Organismes de Gestion de la Destination), les hébergeurs et autres acteurs du tourisme et de l’événementiel. Mais, les résultats sont également significatifs avec la diffusion de fictions, en streaming vidéo et au cinéma : lorsqu’une grosse production choisit le quartier d’une ville (un terroir, une région ou un site) pour tourner une scène de poids (ou carrémment, une série entière comme celles diffusées en avant-prime time sur TF1 ou France2), on observe des résultats significatifs après diffusion.
De 2000 à 2006, la célèbre trilogie Le Seigneur des anneaux a produit 40 % des visites annuelles supplémentaires en Nouvelle-Zélande. En 2012, le tourisme est ainsi devenu le deuxième secteur économique du pays grâce aux voyageurs étrangers visitant les sites-plateaux.
La présence des territoires dans les contenus à succès, souvent comme décors générateurs d’ambiance, c’est aussi Harry Potter, dont la série de films a provoqué une hausse de 230 % du volume de visiteurs sur les sites des tournages, dans le comté de Northumberland, au Nord de l’Angleterre. L’économie locale, de 2011 à 2013, a profité d’un impact direct avoisinant 10 millions d’euros. Plus modestement (mais quand même ), le choix porté par la série Game of Thrones sur la ville de Dubrovnik, en Croatie, a généré 7% de tourisme en plus sur une période de quatre ans. La tendance actuelle, c’est la révélation de petites destinations méconnues. Netflix, avec sa cadence de production extraordinaire, permet de positionner des contenus et des lieux nouveaux comme jamais auparavant. Avec même des excès : Maya Bay, la célèbre baie thaïlandaise du film "La plage", souffre de surfréquentation depuis sa mise en lumière à l’écran.
Les voyages inspirés par les films ont doublé
© Netflix / UNWTO
Signe d’une montée en puissance de la génération Y et des millenials, entre 2017 et 2021, le nombre de voyageurs inspirés par des films et des séries a doublé dans le monde. Il représentait 80 millions de personnes en 2019. L’analyse des habitudes de voyage, selon l’UNWTO, révèle que le ciné-tourisme a pris son envol dans la décennie 1990. Aujourd’hui, il est un puissant vecteur de notoriété, un grand générateur d'envies et, finalement, un prescripteur de choix de destinations, pour le tourisme domestique et international. Ces données sont contenues dans l’étude "Affinité culturelle et tourisme d'écran - Le cas des services de divertissement sur Internet", publiée par la World Tourism Organization (UNWTO), en partenariat avec Netflix. Ce rapport évalue l’impact des services de vidéo à la demande sur les pratiques touristiques. Il souligne que le "ciné-tourisme", brutalement anéanti par le Covid, prendra sa revanche une fois que les restrictions de déplacements à l’international auront été supprimées.
Selon la tendance qui devrait se renforcer…
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60 % des personnes qui regardent des films Netflix comme Solo, Dans la peau du loup et 4L s’intéressent davantage, du coup, à la nature et à la faune espagnoles.
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Les clients Netflix allemands qui regardent des contenus japonais sont deux fois plus susceptibles de préférer le Japon comme future destination de voyage n°1.
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Dans le monde, les spectateurs de contenus canadiens sont 2,1 fois plus susceptibles de choisir d’abord le Canada.
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Surtout avec Netflix
La montée de Netflix, leader de la vidéo à la demande avec 213 millions d'abonnés dans le monde, décuple les effets d’un phénomène aussi vieux que Hollywood, qui diffuse une image idéalisée de l’Amérique depuis 1911. D'ailleurs, que serait le tourisme à Paris sans le cinéma ? Une enquête développée de 2020 à 2021 sur l’impact et les réactions des téléspectateurs exposés à des contenus provenant de différents pays révèle que la possibilité de vacances est plus forte vers les territoires présents sur Netflix. L’impact record concerne la Turquie, vers laquelle la plateforme US est susceptible de générer des flux de touristes évalués à 54% chez ses abonnés, contre "seulement" 24% chez les autres, consommateurs de contenus de façon classique.
Surtout en France
La mise en lumière des territoires selon leur diffusion sur Netflix est particulièrement impactante en France, en tout cas concernant l’exemple de la Turquie. L’étude de l’UNWTO aborde cette question en parlant d’une "affinité culturelle" induite par les films et les séries. Elle démontre que l’attrait généré vers une culture ou un pays précis peut compléter l’envie de voyager par le désir d’aller plus loin, de découvrir des valeurs. Les plateformes de vidéo font office de "miroirs", ce qui signifie que l’on peut attendre un intérêt particulier, au-delà d’un séjour normé. Le tourisme durable, avec moins de saisonnalité, et l’attirance pour la tradition culinaire et les arts propres à un pays font partie des impacts. Le rapport prolonge cette idée en affirmant que cette vision maximisée doit rendre possible la promotion de produits locaux et "stimuler les résultats économiques, sociaux et environnementaux". Au-delà, il faut voir dans le ciné-tourisme un renforcement des liens avec les habitants des pays et leurs traditions. L’étude souligne que le tourisme culturel devrait se développer sur la période 2021-2026 grâce à cette influence par écran.
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Vers une stratégie française ?
Dans l’Hexagone, les agences et organismes publics œuvrant pour transformer de lieux en plateaux de cinéma sont nombreux : "Occitanie films" attire des tournages à Montpellier et Toulouse, "Toulouse Tournages" fait de même pour la ville. Bretagne Cinéma, le Bureau d'Accueil des tournages Grand Est, l’Agence du Film Béarn Pays Basque sont sur la liste. La région Nouvelle Aquitaine dispose de 9 commissions du film locales. Globalement, la Commission Nationale du Film ("Film France") agit pour positionner les territoires.
L’UNWTO propose une solution générale, applicable en bleu-blanc-rouge : "Les plateformes et les gouvernements devraient travailler ensemble sur le phénomène de l’affinité culturelle et du ciné-tourisme". Cette alliance "serait utile pour bâtir des stratégies locales visant à relier les secteurs de la création et du tourisme".
La relation cinéma-tourisme est forte : "si une ville n’est pas filmée, elle sort de l’imaginaire et perd en attractivité", assure Michel Gomez, délégué de la Mission Cinéma de Paris. Selon l’Office de tourisme de Dunkerque Côte d’Opale, après la sortie du film de guerre "Dunkerque", de Christopher Nolan, en 2017, le tourisme britannique a bondi de 350 % au cours de l’été. Pour sa part, le Centre national du cinéma (CNC) calcule que "chaque euro investi par les collectivités locales dans un film, une fiction ou un documentaire génère 6,60 euros de retombées directes et 1 euro de tourisme". Le total, 7,60 euros, fait réfléchir.
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Encore plus demain… mais avec de la qualité
L'Organisation Mondiale du Tourisme s’est aussi penchée sur la durabilité du tandem cinéma-tourisme. Elle explique que la consommation accrue de contenus, fruit des confinements et autres replis provoqués par la pandémie de Covid, profite à la création d’un imaginaire vers les destinations. Netflix (en particulier) tient un rôle déterminant dans la construction de nouveaux, virtuels, mais générateurs d’imaginaire. "Les films et les séries télévisées ont un impact énorme sur le façonnage de la perception d’un pays et de sa culture, la qualité du contenu l'emporte sur la quantité". L’étude précise cependant que "le danger de se concentrer sur la quantité est que l'on pourrait se retrouver avec des productions de mauvaise qualité qui produiraient le contraire de l’effet désiré". En somme, une destination présente dans un mauvais film (ou une mauvaise série) sera pénalisée. L’avantage touristique recherché deviendra un boulet.