25% des départs seront des "voyages vengeance" !

On pensait qu'il s'agissait d'une pulsion, donc temporaire. Pourtant, il semble que les "revenge travel" (déjà observés après la reprise en Asie) représenteront une vraie tendance marketing de l'été 2021. Les habitants mis sous cloche pendant tout le Covid, et sous l'effet des contraintes qui se desserrent, se transforment en voyageurs frénétiques. Ils deviennent des clients avides d’expériences, partant plus souvent qu’avant la pandémie. Cet été, ils seront 25 % parmi l'ensemble des voyageurs, selon The Vacationer. De quoi vous rassurer sur le potentiel du marché et développer des offres pour ces clients qui ont parfois accumulé de l’argent de poche, faute de pouvoir le dépenser.

On rembobine quelques semaines pour voir ce que ce “voyage vengeance” veut dire. Dès janvier, nous avons pressenti cette tendance de 2021, venue des USA, mais née en Asie. Le "revenge travel", conceptualisé par le célèbre cabinet de conseil McKinsey, a été observé dès les premiers déconfinements en Chine. La population avait tellement été mise sous contraintes qu’elle a vécu la “libération” comme une période fofolle, pour oublier les restrictions. Elle a consommé des séjours de façon subite et en quantité. Cette boulimie de voyages a même compensé une année de privations... et de chiffres d'affaires.
On parle donc de "voyage revanche" ou "voyage vengeance". Lisez notre article, où il est question de ce phénomène. Certains consommateurs ont même reporté leurs projets de mariage, anniversaire de mariage ou autres événements… tout en dépensant plus que prévu, car ils ont économisé du “cash”’ faute de pouvoir sortir pendant de longs mois. Le printemps et surtout l’été 2021 doivent être pour certains un temps de voyages compensatoire, avec des dépenses tous azimuts, voire un lâchage intégral.

Un quart des clients veulent multiplier les séjours

Dès novembre 2020, nous évoquions la tendance "Voyager plus et dépenser plus", mais il y a du nouveau : la proportion de vacanciers en mode “revanche” est désormais connue. Elle représenterait même 25 %, selon le magazine US The Vacationer. Son étude américaine ”Revenge Travel / Summer 2021 Travel Survey”, parfaitement transposable chez nous en raison de facteurs comparables (frustrations, épargne, vaccination, projets), estime que 68 % des sondés voyageront cet été.

Les 25 % de personnes qui prévoient de voyager plus sont bien supérieurs aux 17 % qui, refroidis par la pandémie, prévoient de ne pas bouger. Selon cette même série statistique, il existe un critère sexué : les hommes sont 11 % plus convaincus de partir que les femmes. De toute façon, le public veut globalement voyager et il va falloir satisfaire cet appétit.

Une épargne-covid de 160 milliards d’euros

Vertigineux ! L'épargne des Français, accumulée depuis le début du Covid s’élève à 160 milliards d'euros, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Cette réserve est capitale pour retrouver la croissance, particulièrement dans l’industrie touristique. En termes généraux, l’OFCE prévoit un retour du niveau de PIB par habitant d'avant-crise au premier trimestre 2022. En attendant, tout l’enjeu est d’encourager les Français à s’offrir des séjours, car ils en ont les moyens (pour l’Europe et le reste du monde, on verra plus tard). Vont-ils se rattraper en les dépensant ? Certainement, car cette “épargne non désirée”, comme l’appelle l’organisme cité, doit faire l’objet de 20 % de destockage, soit 28 milliards d'euros, dans un premier temps de sortie de crise. Si l’on a peur, on serre le portefeuille, mais à l’inverse, le facteur confiance en l’avenir intervient en force pour que les voyageurs retrouvent leur spontanéité.


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Comment profiter de la tendance ?

Les semaines à venir vont permettre de capter le désir de partir, et de partir plus souvent. Songeons que les voyageurs isolés, voire enfermés dans le télétravail, les réunions en visio et le fameux “distanciel”, ont surtout besoin d’insouciance et d'évasion. Et si la pandémie et ses contraintes revenaient après l’été, comme en 2020 ? Et si cet été était une parenthèse, et pas du tout la fin de la pandémie ? Les voyageurs peuvent resssentir une double pression (le passé douloureux et l'avenir incertain), et donc vouloir maximiser le présent.
Il est primordial pour les hébergeurs de miser sur le sentiment du moment. "Prenez votre revanche, venez chez nous" est le message résumant la communication à déployer ouvertement, en utilisant volontairement l'idée de se défouler, de se venger, de s’offrir du plaisir après tant de souffrance... Les envies naissent d’une période de privations que personne n’avait connue, à part les anciens. En somme, privés de dessert, certains voyageurs veulent une double ou une triple ration !

Attention cependant, il est bien question de jouer sur la fréquence des séjours, éventuellement sur le tarif : un voyage vengeance peut être garni d’options et bonus en tout genre (repas, soins, bien-être etc), composer des offres à valeur ajoutée est attendu par certains, prêts à débourser davantage pour un séjour (ou des séjours !) encore plus mémorables. Mais en parallèle, le budget des vacances est en baisse constante pour ceux qui partent : "Même ceux qui décident de partir diminuent leur budget”, affirme le bureau d’études VVF Ingénierie dans une étude française parue à la mi-avril.

PRÊTS À RÉDUIRE LEURS DÉPENSES
Avril 2020 19 %
Mai 2020 27 %
Novembre 2020 42 %

En résumé, les 25 % de voyageurs surmotivés sont un profil à séduire, mais rien ne prouve qu’ils investiront davantage dans chacun de leurs (nombreux) séjours… L’enjeu est donc bien plus de les attirer (plusieurs fois, pourquoi pas), plus que de vouloir augmenter leur panier de dépenses. IL s'agit de mobiliser des efforts et de l’imagination pour trouver les bons codes, afin d'exister auprès de cette cible, qui est bien plus d’une niche.