Ce que les plateformes doivent déclarer au sujet des loueurs de meublés

blog-elloha-decret-plateforme-locations-30-octobre-2019

À compter du 1er décembre prochain, les mairies pourront tout obtenir des plateformes de locations au sujet de qui loue quoi sur leur commune, pour combien de nuitées, etc ... Un dispositif supplémentaire pour muscler l'arsenal des pouvoirs publics vis-à-vis de la jungle des locations de vacances.

Le décret est paru ce 30 octobre et il commençait sérieusement à se faire désirer à la fois par les maires et les syndicats hôteliers. Ce décret oblige désormais les plateformes comme AirBnB, HomeAway ou LeBonCoin à déclarer quels propriétaires diffusent des annonces sur leur site, pour quelle adresse et surtout, pour combien de nuitées ces derniers ont reçu des réservations durant l'année écoulée.

Théoriquement, ces informations - qui doivent être transmises aux communes concernées - doivent permettre d'évaluer avec précision qui loue sur un territoire donné, si chaque location est bien déclarée en mairie comme la loi l'impose et si, compte tenu du nombre de nuitées déclarées, le propriétaire est bien "raccord" avec le montant de la taxe de séjour à régler ...

Nouveau call-to-action

A compter du 1er décembre prochain (date d'entrée en vigueur du décret), les plateformes concernées devront se plier aux demandes des mairies comme le précise le décret : sur simple demande de la commune, la plateforme devra mentionner une série d'informations pour chaque meublé de tourisme ayant fait l'objet d'au moins une location par l'intermédiaire de la plateforme en question, "y compris si ce meublé n'est plus offert à la location à la date de la demande" comme le précise le décret.

La plateforme devra répondre avec précision et devra mentionner :

  • l'adresse du local meublé "précisant, lorsqu'elle en a connaissance et si ce dernier fait partie d'un immeuble comportant plusieurs locaux, le bâtiment, l'escalier, l'étage et le numéro d'appartement",
  • le numéro de déclaration (en mairie) du meublé tel que le propriétaire l'aura indiqué à la plateforme,
  • le nombre de jours au cours desquels ce meublé a fait l'objet d'une location par l'intermédiaire de la plateforme.

Cette communication ne sera ni automatique ni systématique: selon le décret publié la semaine dernière, ce sera aux mairies qui se sentiront concernées de saisir les plateformes de leurs demandes.

En revanche, si la demande peut se faire par simple e-mail (à condition d'avoir identifié le bon interlocuteur au sein de la plateforme ...), cette dernière disposera d'un mois, pas plus, pour répondre à la mairie.

Ce décret vient renforcer "l'arsenal" des communes qui entendent mieux maîtriser (contrôler ?) le phénomène des locations de vacances chez le particulier :

  • pour identifier les propriétaires négligents : qui louent sans avoir déclaré leur bien et leur activité en mairie,
  • pour mieux gérer la collecte de la taxe de séjour: qui pose de sérieux soucis d'organisation dans certaines (petites) communes,
  • pour donner le change aux hôteliers de la commune qui souffrent de cette nouvelle forme de concurrence et exigent de leurs édiles des actions mieux encadrées,
Nouveau call-to-action

Attention, toutefois, ces dispositions ne s’appliquent que dans les communes qui ont décidé de soumettre à déclaration préalable les locations de meublés de tourisme établies sur leur territoire (ou lorsqu'elles imposent des déclarations propres aux changements d'usage des habitations) et, surtout, elle reste à la discrétion de la mairie qui peut décider de l'appliquer ou non. Toutefois, il y a fort à parier que, sous la pression des hébergeurs "marchands" (hôtels et maisons d'hôtes), certains maires reçoivent d'amicales pression pour engager la procédure chez eux.

Toutefois, pour éviter les abus, le décret prévoit que cette demande d’information ne peut avoir lieu qu’une fois par an. Dans les grandes villes, elle doit permettre de vérifier plus efficacement, s’agissant d’une résidence principale, si la durée maximale de 120 jours de location a bien été respectée.

Reste aussi le sujet du contrôle de la collecte et du reversement de la taxe de séjour - par les plateformes- aux communes ayant fixé une taxe au réel, soit 22.000 communes sur les 36.000 que compte le pays... En 2019, un mécontentement s'est largement exprimé par de nombreuses communes qui n'ont pas retrouvé "leurs petits" et ont reçu tardivement les fonds en provenance des plateformes (y compris AirBnB).

Certaines communes n'ont toujours pas reçu - semble-t-il - leur dû et, pour celles qui l'ont reçu, le compte semble ne pas y être. Plus alarmant, les communes reçoivent des montants des plateformes sans aucun détail leur permettant de savoir pour qui et pour combien de temps la taxe a été collectée, sur quelles adresses, quels locataires, etc ... Une sérieuse pagaille à laquelle ce nouveau décret pourrait partiellement permettre de remédier en "réconciliant" les bonnes informations.

Pour la saison 2019 désormais achevée et la saison 2020 qui approche, AirBnB prévient :"Un premier versement sera effectué mi-décembre 2019 pour la période de collecte 1er janvier 2019 au 31 octobre. Un second versement pour la période 1er novembre 2019 au 31 décembre 2019 interviendra au premier trimestre 2020, souligne un communiqué d'AirBnB. Nous rappelons que malgré les difficultés liées à la mise en place de la réforme votée fin 2018, Airbnb s'est engagée à reverser aux communes les montants correspondant aux tarifs 2019."

Le décret de la semaine dernière est un dispositif supplémentaire pour aider les pouvoirs publics (certes, comme toujours, dans le désordre) à mieux maîtriser le phénomène galopant des locations de vacances sur les plateformes. Toutefois, le dispositif continue de cumuler de sérieux trous dans la raquette :

Par exemple, chez AirBnB, selon leur dire, le système de collecte ne permet pas d’identifier et de prendre en compte les exonérations (enfants, travailleurs saisonniers ...). Dans ce cas, comme le souligne AirBnB: "Si un voyageur estime pouvoir prétendre à une exonération, il lui appartient de demander un remboursement à la Mairie de la commune où a eu lieu le séjour..." Un vrai casse-tête chinois comme le rappelait l'article récent de TourMag à ce sujet.

D'autres améliorations très nettes sont attendues pour les prochains mois mais, nul doute, que les mairies sauront mettre en oeuvre les dispositions du dernier décret pour mieux cerner l'activité de leur territoire, organiser de manière plus efficace le contrôle de la collecte de leur taxe de séjour et apporter des réponses plus efficientes aux hébergeurs "marchands" quant à leur maîtrise (ou non) de cette ubérisation du tourisme qui bouleverse littéralement tous les équilibres économiques d'un territoire.