47% des points de fidélité des hôtels ne sont pas utilisés
Si près d'un voyageur sur deux laisse perdre ses points de fidélité, c'est surtout la preuve que certains programmes n'ont plus aucun intérêt. A ce jeu-là, certaines chaînes hôtelières risquent rapidement de se trouver à court d'arguments pour attirer de nouveaux adhérents, qu'il s'agisse d'hôteliers ou de voyageurs ...
On s'en doutait un peu ... rares sont les programmes de fidélité qui marchent, surtout dans l'hôtellerie. A moins d'offrir la puissance d'une chaîne mondiale comme Accor - et donc, de vraies opportunités de consommer ses points - devoir passer plus de dix nuits dans les établissements affiliés à une chaîne donnée pour gagner, au final, une tasse à café n'a vraiment rien d'attractif. Et pourtant, c'est souvent le lot ... des petites chaînes hôtelières qui s'accrochent à leur programme de fidélité (souvent très coûteux pour les hôtels de leur réseau) un peu "pour faire comme les grandes" mais qui ne parviennent pas à tirer profit de ces programmes ... leurs clients, non plus, d'ailleurs.
Car, c'est ce que révèle la dernière enquête de BankRate, une startup américaine qui révolutionne l'information bancaire: selon elle, de par le le monde, 47% des clients ne profitent jamais des points de fidélité qu'ils ont accumulés dans "leur" chaîne d'hôtel. La raison ? Ces points ne donnent droit à rien ou "à pas grand chose" et les clients les laissent donc tomber. Si on rajoute à cette catégorie les 13% de porteurs de points qui ne savent pas quoi en faire, cela signifie que les programmes de fidélité ne profitent qu'à 40% des porteurs de carte. Tout bénéfice pour la chaîne !.. Mais pas forcément pour l'hôtelier qui, lui, a "cotisé" à hauteur de 3 ou 8% au programme de fidélité de son réseau, sans forcément recevoir de nouveaux clients en échange.
Cette étude démontre que - sauf en ce qui concerne les grandes chaînes mondiales (ou les nouvelles chaînes de type 3.0, lire notre article) - rares sont les programmes de fidélité qui donnent satisfaction.
Car la satisfaction doit toucher à la fois le client - en premier lieu ! - que le programme doit l'inciter à revenir dans les adresses de la chaîne ... mais aussi, l'hôtelier participant. Ce dernier, en effet, paie en moyenne pour chaque client adhérant à un programme de fidélité d'une chaîne une commission additionnelle de 2,8%.
Par exemple, je reçois un client porteur de la carte de fidélité de mon réseau, je lui vends une nuitée à 100€, je vais (en plus des royalties dues à mon réseau) devoir "cotiser" 2,80€ au programme de fidélité. Cet argent va donc directement dans les caisses de la chaîne que le client ait, au final, utilisé ses points ou non.
D'ailleurs, le sujet de la consommation des points par les membres d'un réseau (carte de fidélité) reste assez opaque et rares sont les chaînes qui communiquent dessus. Normal, ce qui n'est pas consommé reste dans les caisses de la chaîne.
Ce thème de la fidélité sera certainement remis en question dans les prochaines périodes car de nombreux hôteliers affiliés à des réseaux de "moindre importance" commencent à souffrir de cette situation sans vraiment savoir ce que devient leur argent et, surtout, ce qu'il rapporte vraiment à leur établissement ... Certaines chaînes, pour gagner de nouveaux hôteliers, affirment que leur programme de fidélité peut générer jusqu'à 20% du chiffre d'affaires d'un hôtel. D'après un certain nombre de propriétaires interrogés, on est vraiment loin du compte ...
Pour Bankrate, les générations plus jeunes (les fameux Millenials) sont généralement plus susceptibles que leurs aînés de perdre leurs points avant l'expiration. La fidélisation "à la papa-maman" semble ne pas donc prendre sur cette génération de plus en plus aguerrie aux "tactiques marketing" et soucieuse de maintenir un sentiment (avéré ou non) de plus grande liberté.
En revanche, c'est la parité absolue en ce qui concerne les hommes et les femmes qui semblent tout aussi susceptibles de laisser expirer leurs points, leurs miles ou leurs récompenses.
En revanche, certaines différences sont nettes au niveau du revenu annuel: les consommateurs les moins bien rémunérés sont les plus susceptibles de laisser expirer leurs points. Ce que met en lumière l'enquête, c'est que - quelque soit le niveau social - les clients considèrent (chacun à leur niveau) que les systèmes de fidélité ne récompensent pas assez. D'où un décalage entre la valeur perçue et la valeur réelle des récompenses de fidélisation ...
Par exemple, seuls 25% des porteurs de cartes sondés ont été en mesure d'indiquer le nombre de points d'hôtel dont ils disposaient et 29% seulement connaissaient le total de leurs miles de fidélisation.
Enfin, plus de la moitié des personnes interrogées (53%) ont avoué ne pas savoir combien valent les points de fidélisation aux différents programmes auxquels ils ont adhéré.
Enfin, on notera que les voyageurs sont beaucoup plus fidèles à leurs cartes de compagnies aériennes qu'à celles de leurs chaînes d'hôtels. Une explication : on prend plus souvent l'avion (ou le train) qu'on ne va dans une même chaîne d'hôtel et donc, on y cumule plus de miles qui, eux-mêmes, sont consommables plus souvent et de manière plus profitable que dans certaines chaînes hôtelières.
En conclusion, la fidélisation coûte cher à l'hôtelier et - selon la taille de sa chaîne - elle ne lui rapporte pas grand chose. Ces différents programmes sont créés pour lui attirer plus de clients mais la question qui se pose est de savoir si l'hôtelier ne peut pas parvenir par lui-même à les attirer par une politique tarifaire plus agressive (comme le cashback, par exemple) sans promettre des gains de fidélité auxquels les voyageurs croient de moins en moins et dont ils profitent peu; ce que démontre l'enquête.
A l'exception des grands programmes (de grandes chaînes) où la valeur du point a de l'intérêt et qui permettent au voyageur de profiter de vrais avantages, il est fort probable que les programmes de fidélité bas ou moyenne gamme aient vécu leurs plus belles heures jusqu'à présent. Sur ce point aussi, certains réseaux vont devoir se réinventer car, après avoir perdu la bataille de la notoriété et de la distribution, la fidélisation restait encore un sujet sur lequel certaines chaînes (manifestement à tort) continuaient de prospérer.