ChatGPT fera-il faire baisser les commissions ?

ChatGPT fera-il faire baisser les commissions ?
Il est des signes qui ne trompent pas ... une publicité pour valoriser ses services de voyages, des débats qui montent de plus en plus forts sur une possible annonce retentissante d'ici quelques mois ... et si ChatGPT préparait aussi une révolution dans l'univers du voyage ?

Au fur et à mesure que ChatGPT prend forme (dans tous les domaines de nos vies quotidiennes et de nos économies), chaque univers se demande comment le leader des moteurs IA dans l'évolution de ses modèles économiques et de consommations.

Plutôt via Chat ou un OTA ?

C'est, bien évidemment, le cas de l'univers du voyage où Chat ne compte pas rester inactif, au contraire ... D'ailleurs, ses récentes campagnes publicitaires (voir plus bas) s'appuient aussi sur l'univers du voyage pour montrer à quel point le "moteur" peut apporter un soutien jusque là inédit.

Depuis quelques semaines, sur la base de cette publicité, de nombreuses langues se délient pour affirmer haut et fort que Chat ne ménagera aucune ambition dans ce domaine. Et de ressortir cette interview de novembre 2024 (une éternité dans l'univers de l'IA) où Sam Altman, le fondateur de GPT, donne une idée plus précise des services qu'il imagine ... et surtout, des modèles économiques qu'il compte y appliquer.

Dans cette interview, Sam Altman affirme haut et fort que, très bientôt, la plupart des voyageurs choisiront bientôt leur hébergement via ChatGPT plutôt que via un OTA. Selon lui, ChatGPT sera en capacité de réunir plusieurs fonctions essentielles comme la recommandation, la comparaison et ... la réservation dans un même flux.

Il en profite, d'ailleurs, pour critiquer les classements qu'ils considèrent biaisés par les OTAs ... car dépendants des niveaux de commission payés par les hébergeurs !

Car, pour Sam Altman, la préparation d'un voyage sur la base de suggestions est d'abord une question de confiance: si les propositions formulées sont "faussées" par des leviers financiers (les commissions payées ou acceptées par les hébergeurs ou les grandes chaînes hôtelières), les voyageurs finiront par perdre confiance dans les services proposés.

Ainsi, en tournant explicitement le dos à un système basé sur la commission, Sam Altman affirme explicitement que "les OTAs perdront leur avantage actuel de moteur de découverte".

Pour ce dernier, planifier un voyage implique beaucoup de recherches, beaucoup d’options, beaucoup de stress ... et les voyageurs veulent une réponse simple et personnalisée, "non pas des dizaines de pages d’hôtels !"

Et, selon lui, c'est là que l’IA prendra tout son sens en analysant les besoins, le budget, les préférences implicites des voyageurs, puis en sélectionnant quelques options vraiment pertinentes, "sans les biais de classement propres aux OTAs (publicité, commissions, enchères CPC…)".

Dans l'absolu, Sam Altman affirme même que le futur de ChatGPT sera transactionnel : "Vous pourrez dire "réserve-moi cet hôtel" et ce sera fait immédiatement". Et de comparer ce service à Amazon One-Click, mais pour les voyages.

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Le parcours client n’est plus linéaire. Un voyageur peut commencer par une simple question posée à ChatGPT — "meilleures chambres en bord de mer près de Nice" — et recevoir en quelques secondes des recommandations et des itinéraires entièrement personnalisés, contournant totalement les résultats des moteurs de recherche traditionnels (notamment, Google). L’IA se donne comme mission de réduire "la phase de découverte" à quelques interactions seulement. C’est un enjeu majeur : pour les professionnels du tourisme qui ne sont pas structurés et optimisés pour être visibles dans les environnements pilotés par l’IA, le risque de devenir invisibles aux yeux des futurs clients est réellement colossal. Selon les recherches (HSMAI), à l’horizon 2026, 50 % du volume de recherche basculerait des moteurs classiques vers des plateformes conversationnelles alimentées par l’IA. Ce changement repose sur ceux des clients qui recherchent, à travers l'IA, un accompagnement personnalisé à chaque étape. Ils attendent, en fait, l’équivalent numérique d’un "concierge" avec des suggestions d’activités, des propositions d’upgrade, la gestion des changements de séjour, etc. En clair, si un professionnel du tourisme n’est pas capable d’offrir ce niveau de service en ligne, le client se tournera rapidement vers un concurrent qui le fera mieux que lui. L’IA n’est donc pas un simple canal digital de plus ... elle a vocation à devenir le nouveau système d’exploitation du parcours client.

Pas de commission, pas de publicité ?

Dans un propos "puriste", Altman affirme sa détermination "à ne pas intégrer de système publicitaire ou de commission dans ChatGPT", de sorte que son moteur apparaisse comme "un conseiller neutre". Et d'ajouter que "c’est précisément ce manque de neutralité" qui rend les OTAs vulnérables face à l'IA. Autre point, pour Sam Altman, les futurs "agents personnalisés" de ChatGPT en feront un compagnon de voyage à part entière pour suivra l’utilisateur pendant tout son voyage, adapter les suggestions en temps réel et gérer, notamment, les imprévus (vol annulé, changement météo, modifications de plans) de manière totalement autonome et en temps réel.

Enfin, dernière alerte à l'adresse des OTAs: "Nous ne prendrons pas d’argent pour classer un hôtel pire au-dessus d’un meilleur car ça tue la confiance". Et de prévenir que les marges (commissions) sur les réservations seraient amenées à chuter radicalement ...

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ChatGPT collabore déjà avec Booking et Expedia : depuis la fin de cette année (octobre), ChatGPT intègre officiellement des "apps" de voyage qui permettent de rechercher des hébergements, des vols et des séjours directement dans le chat. L’utilisateur peut demander “trouve-moi un hôtel à Rome”, et ChatGPT affiche immédiatement les résultats issus de Booking et/ou Expedia avec prix, photos et disponibilités. La réservation se finalise ensuite sur l’OTA. Ce service est actif partout sauf en Europe et son déploiement sur le vieux continent (dont la France) est annoncé sine die, donc, pas encore effectif. Si pour les voyageurs, c’est une expérience simplifiée et conversationnelle (voir plus haut), pour les OTAs partenaires (conscients de la menace IA), c’est d'abord un moyen de capter les clients dès la phase d’inspiration. S'ils n'y prennent gare, pour les hébergeurs qui ne développent pas un site direct compatible IA, c'est un risque accru de dépendance (aux OTAs) et une perte de visibilité de leur canal direct.

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L'’IA dans l’hôtellerie: qui l’utilise vraiment, qui ne l’utilise pas, et pourquoi ? En 2025, l’hôtellerie n’en était plus à se demander si elle utilise l’IA, mais comment. Environ 55 à 60 % (selon Statista et Deloitte) des hôtels utilisent déjà au moins un outil d’IA (souvent sans le savoir), mais seule une minorité l’intègre réellement dans une stratégie globale. Les employés adopteraient l’IA plus vite que leurs employeurs : près de 90 % des professionnels s’en servent déjà pour écrire, analyser, prévoir, automatiser.
Les hôtels recourent à l’IA non par attrait technologique, mais pour gagner du temps, réduire la pression opérationnelle, mieux répondre aux clients et optimiser les revenus. L’IA est aujourd’hui principalement utilisée pour : la messagerie client, la gestion des revenus, la maintenance prédictive et le ménage, le marketing automatisé et le CRM. Pourtant, de leur propre aveu, seulement 40 à 45 % des hôtels n’en tireraient encore qu’un usage limité, freinés par des croyances anciennes (“trop cher”, “pas d’expertise”, “notre PMS est trop vieux”, “le personnel résiste”). En réalité, ces obstacles relèvent surtout d’un manque de temps, de cadre et de formation. Quant aux "petits" hôtels, ce sont eux qui pourraient bénéficier le plus vite de l’IA car selon leurs réponses, elle compenserait efficacement le manque de personnel, elle permettrait de mieux protèger les marges (en matière de choix de gestion), elle aiderait efficacement à stabiliser la e-réputation (avis) et transformerait un "manager débordé en opérateur 10× plus efficace". En conclusion, l’IA "ne remplace pas l’hospitalité, mais elle la restaure" selon les auteurs de l'étude, notamment, en redonnant du temps au personnel. L’avenir n’appartiendrait pas, pour autant, aux seuls hôtels qui adopteraient l’IA le plus rapidement, mais à ceux qui l’intègrent le plus profondément, avec une vision, une feuille de route et une culture adaptée. Le véritable défi ne serait donc pas technologique, mais stratégique et humain.