Budget 2026: le rural encouragé, le trait de côte taxé !

Budget 2026: le rural encouragé, le trait de côte taxé !
Certes, les débats ne font que commencer et, sans une majorité vraiment stable, le gouvernement sera probablement tenter d'accepter de nombreuses propositions pour garantir l'adoption sereine de son prochain budget. En matière d'immobilier et de tourisme, les propositions pleuvent et, même si elles ne seront pas toutes adoptées, elles portent un éclairage plus-que-cru sur la perception des enjeux du secteur par nos députés ...

Le coup d'envoi des débats budgétaires a sonné, la semaine dernière, un premier coup de semonce sur les locations de meublés (lire notre article) et la révision (pas très avantageuse pour les "grosses locations de vacances") des seuils de TVA sur les meublés touristiques.

Le Blog elloha : TVA à 37 500 € dans le PLF 2026 — le vrai impact pour les meublés de tourisme
Selon le blog du channel manager elloha, le PLF 2026 abaisse la franchise en base de TVA à 37 500 € pour les locations meublées touristiques : une bascule qui pourrait requalifier nombre d’hébergeurs en “para-hôteliers”. Qui est touché, quels services déclenchent la TVA ?

Cette semaine, d'autres propositions sont soumises aux différentes commissions parlementaires et devraient aussi - sauf non-adoption - bousculer dans tous les sens (bons et mauvais) des pans entiers de l'économie touristique.

Les gîtes ruraux et les maisons d'hôtes privilégiés

Le député Fabien Di Filippo (LR) a soumis une proposition de "rétablissement de l'avantage d'exploiter en maison d'hôtes" pour les différencier du traitement (fiscal) réservé aux locations de vacances par la récente sur le logement et les locations de meublés.

Si cet amendement venait à faire l'objet d'une intégration dès le budget 2026, les gîtes ruraux et chambres d’hôtes bénéficieront d’un régime fiscal spécifique; c'est-à-dire, différent de celui appliqué aux meublés touristiques urbains. Pour le parlementaire, cette mesure - discrète mais stratégique - répond à une réalité : en zone rurale, l'accueil touristique n'a rien à voir avec un "Airbnb" en centre-ville.

Jusqu’ici, en effet, les gîtes et chambres d’hôtes étaient logés à la même enseigne que les meublés de tourisme. Avec la loi de 2024, l’abattement fiscal de 71 % avait chuté à 50 % pour ces derniers, dans un objectif de régulation des locations de courte durée en zones tendues.

Nouveau call-to-action

Si la proposition était votée dans le budget, pour les hébergeurs ruraux, le couperet n'aurait donc été que de courte durée puisque ces derniers bénéficieraient d'un abattement de 71 %, dans le cadre du régime micro-BIC, pour un plafond de chiffre d’affaires inchangé, soit jusqu’à 188 700 € par an. En cas de vote favorable du Parlement, l'entrée en vigueur serait même fixée au 1er janvier 2026.

Une reconnaissance juridique inédite des "gîtes ruraux"

Autre grande nouveauté : les gîtes ruraux feraient enfin leur entrée dans le code du tourisme avec une définition claire. Ainsi, selon le texte proposé (Amendement n°I-3767, déposé hier, jeudi), pour être reconnu comme tel, l’hébergement devra être une maison indépendante ou un logement dans un petit immeuble (de 4 logements maximum), se situer hors des métropoles (exit les grandes villes pourtant déjà représentées, par exemple, dans les labels Gîtes de France et Clévacances), afficher (justement) un label de qualité officiel reconnu par l’État et, enfin, être contrôlé régulièrement par son organisme de labellisation.

Pour le parlementaire, dans les débats sur l'explosion des locations touristiques, "en réalité, le tourisme rural n’est pas le problème ...". Pour ce dernier, contrairement aux locations touristiques massives qui grignotent les logements des villes, "les gîtes ruraux sont des moteurs de développement local". Et de citer les chiffres fournis par la profession: 2,2 milliards d’euros de retombées économiques par an, 530 millions d’euros de recettes fiscales et sociales pour l’État, plus de 31 500 emplois directs ou indirects et, pour terminer, 850 millions d’euros investis chaque année dans le bâti rural. Pour le député Di Filippo, "ce modèle est bien l’opposé des dérives du tourisme de masse".

Selon le parlementaire, dont la proposition semble déjà faire l'objet de soutiens nombreux, "cet amendement vise à différencier clairement les chambres d'hôtes des meublés de tourisme dans le cadre législatif et à ne pas entraver le développement des premières, qui apportent une réelle valeur ajoutée aux territoires ruraux et à notre patrimoine".

Un nouveau coup pour les LNMP ?

Fin d’un avantage phare pour les investisseurs en meublé ?

La proposition du député Di Filippo s'inscrit dans un contexte politique où l'immobilier, le logement et les avantages fiscaux sont particulièrement dans le collimateur des élus et des administrations.

Le 21 octobre dernier, les hostilités avaient commencé par un premier vote qui a, d'ailleurs, fait l’effet d’une bombe dans l’univers de l’investissement locatif puisque les députés ont adopté un amendement visant à supprimer l’amortissement fiscal pour les LMNP (Loueurs en Meublé Non Professionnels).

Cette décision, si le vote du budget la confirmait, serait un changement de cap majeur pour un régime jusqu’ici plébiscité pour sa rentabilité fiscale.

Jusqu’à présent, en effet, les LMNP déclarés au régime réel BIC bénéficiaient d’un avantage fiscal redoutable avec l’amortissement du bien. En clair, ces derniers pouvaient, chaque année déduire une fraction du prix d'achat de leur logement de leurs revenus locatifs, ce qui leur permettait de réduire fortement voire d’annuler leur imposition, parfois pendant plus de 10 ans. Mais avec cet amendement, cette niche fiscale pourrait disparaître pour les LMNP.

Pour le député Iñaki Echaniz (PS), à l’origine de cette proposition, il s'agit de corriger une "distorsion fiscale" entre la location nue et la location meublée. Car, pour ce dernier, la location nue, soumise au régime des revenus fonciers, ne permet aucune déduction d’amortissement. Résultat ? Le meublé est fiscalement beaucoup plus avantageux; ce qui incite les propriétaires à délaisser la location classique...

Pour le parlementaire, qui a su convaincre ses collègues en commission, l'objectif est clair: "Tendre vers une égalité fiscale entre les deux formes de location, dans un contexte de crise du logement locatif."

Cependant, tout le monde n’applaudit pas la proposition. Le député Philippe Juvin (LR), qui est rapporteur du projet de budget 2026 a fermement critiqué cette suppression car, pour lui, si cet amortissement disparaît, "de nombreux investisseurs particuliers pourraient fuir le marché locatif et le meublé pourrait perdre tout intérêt fiscal, surtout face à des contraintes accrues (encadrement, restrictions locales)". Pour le parlementaire, une partie de l'offre de logements, notamment en zone tendue, pourrait même se réduire encore davantage.

Une taxe sur les plateformes touristiques ?

Enfin, en dernier lieu, un amendement visant à taxer les plateformes de locations touristiques a été voté le 21 octobre dernier. Objectif de la (nouvelle ?) taxe levée ? Obtenir des fonds spéciaux pour financer la lutte contre l’érosion du littoral, selon les termes de l'amendement de la députée Sophie Panonacle (Renaissance). Pour la député, le projet est ambitieux car il s'agit de "faire contribuer les plateformes de location touristique aux coûts de la transition climatique, en particulier sur le littoral français".

Adopté en séance publique dans le cadre du PLF 2026, cet amendement propose la création d’une "taxe littorale" sur les commissions encaissées par Airbnb et ses concurrents, spécifiquement dans les communes situées sur le littoral.

Objectif : protéger nos côtes face à l’érosion

L’idée serait née au sein du "Comité national du trait de côte", qui rassemble élus, scientifiques, représentants d’associations et services de l’État. En partant du constat que l’érosion côtière menace des milliers de logements, de commerces et d'équipements publics, sans que les ressources financières soient à la hauteur pour agir efficacement.

Le hic ? C'est que ce phénomène naturel n’est pas reconnu comme risque majeur, et le Fonds Barnier ne peut pas être mobilisé. D’où l’idée d’une nouvelle ressource financière ciblée et autonome.

La nouvelle taxe toucherait donc principalement les plateformes de mise en relation pour de la location touristique, mais uniquement dans les communes littorales au sens du Code de l’environnement. Elle s’appliquerait sur les commissions encaissées pour des locations de meublés à la journée, semaine ou mois et viserait les plateformes réalisant plus de 750 Millions d'euros de CA mondial, et au moins, 25 Millions en France. Le taux de la taxe serait de 1 %, calculé hors TVA.

En résumé, un modèle très proche de la "taxe GAFAM" déjà en vigueur, mais ciblé ici sur les usages touristiques littoraux.

Il faut dire que l’érosion du trait de côte, bien que prévisible, s’accélère avec le changement climatique. À horizon 5, 30 ou 100 ans, les dégâts potentiels sont massifs. Selon le rapport du Cerema, on parle de milliards d’euros de biens exposés à la montée des eaux et aux reculs de falaises. Pour prévenir ce phénomène, plutôt que de recourir à la dette publique, le gouvernement parierait donc sur une fiscalité ciblée, adossée à une activité touristique en forte croissance, pour financer les actions de "relocalisation des logements menacés, de renaturation des zones côtières et d'acquisitions foncières et aménagements préventifs".

Un Fonds dédié pour des actions concrètes sur le terrain

Le produit de cette taxe alimenterait le Fonds érosion côtière (FEC), prévu dans la mission "Écologie" du budget 2026 dont l'objet est de participer à la mise en œuvre des Stratégies Locales de Gestion Intégrée du Trait de Côte (SLGITC) via des Plans Partenariaux d’Aménagement Littoral (PPAL).

Nouveau call-to-action

Le sujet n’est pas nouveau. En 2024 déjà, un amendement similaire avait été adopté … avant d’être rejeté par la commission mixte paritaire (Sénat + Assemblée). Ce nouveau texte pourrait connaître donc le même sort, même si la pression environnementale et politique s’est, depuis, largement intensifiée.

De nouvelles propositions en attente ...

Le débat fiscal et budgétaire n'a pas dévoilé toutes ses surprises en matière de nouvelles taxes liées au logement et au tourisme. Le contexte budgétaire et politique se prête très bien à l'émergence de toutes ces opportunités qu'il va falloir suivre avec beaucoup d'attention d'ici la fin de cette année ...