Loi Meublés: ce qui va changer dès le 1er janvier
Après les sénateurs (le 5 novembre dernier), les députés ont donc voté la loi de "régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale". Un feuilleton long de 2 ans qui devrait considérablement transformer l'univers de la location de meublés, en particulier, et du tourisme français en général dès le début de l'année prochaine.
"Enfin ! que le chemin fut long ..." selon les parlementaires à l'origine de ce texte de loi qui entrera en vigueur dès le 1er janvier prochain. Sans revenir sur les nombreux aléas qu'a connu ce texte de loi, sa mise en œuvre est donc imminente puisque, contenant des dispositions fiscales, une grande partie de ses dispositions vont entrer en vigueur dès les prochaines semaines.
La fiscalité avant tout !
Evidemment, la principale conséquence de cette loi est fiscale. En "tapant sur le porte-monnaie", les législateurs ont voté en faveur de mesures dites dissuasives pour les propriétaires (ou investisseurs) essentiellement orientés sur les locations de courte durée.
Ainsi, la version finale de la loi apporte des modifications significatives au régime fiscal des locations meublées:
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Pour les meublés non classés, l'abattement fiscal sera désormais limité à 30% des revenus locatifs annuels, avec un plafond de 15 000 euros. Pour rappel, cette mesure représente une réduction importante par rapport au système actuel, qui permettait un abattement de 50% jusqu'à 77 700 euros de revenus. Ce changement aligne donc le traitement fiscal des meublés non classés sur celui des locations nues.
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Les meublés classés et les chambres d'hôtes sont également concernés par ces ajustements fiscaux. Leur abattement sera réduit à 50% des revenus locatifs annuels, plafonné à 77 700 euros. Cela constitue une baisse notable comparée au régime précédent qui accordait un abattement de 71% jusqu'à 188 700 euros de revenus.
Bien que saluant cette évolution comme une "victoire", le député socialiste Inaki Echaniz a exprimé des réserves. Il considère que l'abattement pour les meublés classés et chambres d'hôtes demeure trop avantageux en soulignant la résistance du Sénat à une réduction plus importante de cet avantage fiscal.
Les sénateurs, en effet, ont voulu maintenir un certain avantage fiscal pour les meublés classés afin de préserver le caractère incitatif du classement: ce dernier impose, en effet, selon les sénateurs, des critères de qualité et de confort potentiellement coûteux pour les propriétaires; ce qui justifierait d'un coup de pouce fiscal ...
Cependant, comme nous l'annoncions la semaine dernière, Inaki Echaniz (l'un des députés à l'origine du texte finalement voté) a d'ailleurs confirmé son intention de réitérer ses demandes d'un nouveau coup de rabot dans le cadre des discussions sur le projet de loi de finances 2025. Il reste donc encore quelques inconnues sur le régime fiscal 2025 des meublés classés tant que le débat budgétaire ne sera pas définitivement clos à l'Assemblée.
Toutes les communes "armées"
Alors que, jusqu'à présent, seules les communes de plus de 200.000 habitants bénéficiaient de prérogatives particulières pour "réguler" les locations saisonnières dans leur périmètre, la nouvelle loi créé et étend des prérogratives à toutes les communes de France quelque soit leur taille !
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Réduction de la durée de location touristique: les communes auront désormais la possibilité, sur décision motivée, de réduire la durée maximale de location touristique des résidences principales de 120 à 90 jours par an sur leur périmètre.
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Instauration de quotas: Les municipalités se voient attribuer de nouveaux pouvoirs puisqu'elles pourront, désormais, instaurer des quotas pour les autorisations de meublés de tourisme. Ainsi, dans leur plan local d'urbanisme, elles auront la faculté de délimiter des zones exclusivement réservées à la construction de résidences principales. Selon le texte voté, ces mesures seront applicables dans les "zones tendues" et dans les communes comptant plus de 20% de résidences secondaires.
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Exigences énergétiques: à partir de 2034, les meublés de tourisme (à l'exception des résidences principales) devront obligatoirement disposer d'un diagnostic de performance énergétique de classe D au minimum.
Enfin, la loi instaure une obligation de déclaration renforcée à toute personne proposant un meublé de tourisme à la location, qu'il s'agisse d'une résidence secondaire ou principale. Comme nous l'expliquions dans notre précédent article, cette obligation passera par la déclaration de son meublé sur un serveur national avec un certain nombre de justificatifs à la clé. Les mairies seront aussitôt informées de cette déclaration et pourront plus facilement identifier les meublés de leur territoire qui seraient exploités en "mode pirate". Dans ce cas, le maire aura la possibilité de dresser des procés-verbaux assortis d'amendes administratives pouvant aller jusqu'à plus de 10.000 euros ! Selon un principe de responsabilité en cascade, les conciergeries qui seraient associées à la diffusion de ces offres non-autorisées pourraient également se voir sanctionner par les maires et, ainsi, se voir infliger d'importantes sanctions financières comme les propriétaires !
De leur côté, les plateformes de distribution (comme Airbnb, même si cette loi est appelée à tort "Loi Airbnb") pourront être poursuivie dans le cas où elles diffuseraient les annonces de meublés non déclarés en mairie. Autant dire que tout semble avoir été pensé pour vérrouiller le système de tous les côtés.
Une recomposition du marché ?
La question que pose cette nouvelle loi est, bien évidemment, celle de son efficacité; à savoir, les propriétaires affectés par de telles perspectives fiscales (et la baisse de leur marge nette) continueront-ils de laisser leurs logements sur le marché locatif ?
A vrai dire, si l'on s'en tient aux chiffres publiés par Airbnb, un propriétaire-loueur "occasionnel" génèrerait en moyenne 4000 euros de revenus locatifs sur son ou ses meublés de tourisme. Cela signifie que, même s'il ne l'exploite pas en "meublé classé", ce dernier est encore loin du seuil de 15.000 euros concernant les non-classés: la part de ses revenus locatifs intégrée dans son revenu global sera donc de (4000 euros - 30% d'abattement) 2800 euros au lieu de 2000 euros. Quant à ses prélèvements sociaux, il seront aussi calculés sur la base de 2800 euros (x 17,2%, soit 481 euros au lieu de 344 euros, soit 140 euros de plus par an). Pas sûr, à ce prix-là, qu'il renonce à ses revenus locatifs et qu'il retire son bien du marché.
En réalité, le frein peut venir d'autre chose que de la fiscalité, soit plutôt de l'obligation de déclarer son activité en mairie (et sur les plateformes où ce dernier s'affiche). Jusqu'à présent, ce n'est un secret pour personne, beaucoup des nouveaux loueurs pouvaient encore "passer sous les radars" (tout comme une partie de leurs revenus); ce qui ne sera plus le cas dès cette année. Entre l'obligation de se déclarer pour se rendre sur les plateformes (qui ne pourront pas accepter un bien "non déclaré") et, pour les plateformes, l'obligation de déclarer les revenus réalisés par les loueurs à l'Europe, l'Etat et les communes, il y a de fortes chances qu'une part marginale du "parc locatif" décide de s'évaporer de cette niche de marché ...