13 Milliards $ dépensés par les OTAs en marketing en 2023 !
La puissance de feu des OTAs (Booking, Expedia, Airbnb ...) n'est plus à démontrer même si c'est son ampleur, chaque année, qui a de quoi donner le tournis. Selon les rapports financiers (trimestriels) publiés à ce jour, les mastodontes de la distribution ont investi 30% d'argent en plus pour attirer les voyageurs sur leurs sites et applications de réservation ...
Certainement, pour quelques années encore, Google est le grand gagnant de la guerre que se livrent les OTAs (Booking, Expedia ...) en achetant des tonnes de liens sponsorisés sur ses pages de résultats. En 2023, Booking et Expedia ont même "trusté" 85% des liens sponsorisés du célèbre moteur de recherche ! Sans plus de précisions, il semblerait que Google s'arroge la plus grosse part de ses 13 Milliards $ de dépenses publicitaires !
Plus de la moitié de leurs charges !
Pour les OTAs, le marketing est le levier numéro 1 puisque cette "ligne budgétaire" a représenté 44% des dépenses globales de Booking en 2023 et 52% de celles du groupe Expedia ! Des dépenses qui se retrouvent, par conséquent, pour une grande part dans le montant des commissions que vous payez aux OTAs. À y regarder de près, si l'on prend en compte les bénéfices de ces deux compagnies, on pourrait en déduire que sur 20% de commission que vous leur payez, en réalité, plus de 8% va directement dans la poche de Google ... Pour Booking, par exemple, on estime que la part dépensée chez Google correspond à 4,5% de la totalité d'une réservation brute (en clair, quand vous vendez 100€ une nuitée sur un OTA, 4,5€ au moins sont dépensés chez Google). Ainsi, si pour vous, se pose la question de savoir générer plus de réservations directes (versus via les OTAs), pour un OTA, la question semble aussi la même: comment faire venir les voyageurs sur son site sans passer par Google et lui payer des commissions ? D'où l'importance croissante de leur application mobile, de leurs programmes de fidélité ou encore de leur stratégie d'affiliation (qui consiste à installer leur catalogue sur des sites comme Air France en leur payant une commission moindre qu'à Google).
Booking a plus que triplé ses encaissements directs
Autre sujet financier sensible: l'encaissement des réservations ! Si, jusque dans les années récentes, Booking ne faisait que faire transiter la réservation (et donc, laissait le soin à l'hébergeur d'encaisser puis de payer sa commission), désormais, c'est l'inverse ! Le fameux modèle "Marchand" est dominant (54% des réservations contre 44% en 2022 et 15% en 2014) ! En clair, Booking encaisse lui-même les fonds avant de reverser la "part nette" à l'hébergeur tout en gagnant une part supplémentaire (frais financiers) au passage.
Mais ce n'est pas le seul intérêt de l'opération: avec le mode "marchand", contractuellement, c'est l'OTA qui achète à l'hébergeur à un prix convenu ... libre à lui, ensuite, de pratiquer le prix qu'il entend comme, par exemple, le proposer à un prix plus bas; voire même plus bas que celui proposé par l'hébergeur lui-même ...
Selon l'étude la plus récente de l'HOTREC (qui regroupe tous les syndicats hôteliers européens), non seulement 12% des hôtels voient déjà leurs prix inférieurs sur les OTAs mais, en plus, ils seraient déjà près d'un tiers (28%) à dépendre totalement des OTAs pour entre 30% et 49% de leurs chiffres d'affaires. Tandis que, pire encore, un hôtel européen sur cinq (20%) dépendrait de Booking, Expedia et leurs concurrents à plus de 50%. Pour les hôtels de moins de 20 chambres, la dépendance aux OTAs est encore plus forte puisque les affaires de 27% d'entre eux dépendent des OTAs pour au moins 30% (et jusqu'à 49%) de leurs réservations. Enfin, 27% des hôteliers réalisent au moins la moitié de leurs nuitées uniquement via les OTAs. Mais là encore, les OTAs ne sont pas les premiers responsables de cette situation ...
De plus en plus de promotions
Avec cette évolution déterminée vers le modèle "marchand", les OTAs imposent progressivement leur propre stratégie commerciale et financière.
Pour moins dépendre de grands acteurs marketing comme Google, dans le futur proche, ces derniers multiplient les initiatives pour s'attirer les clients en direct et le modèle "marchand" les y aide avec succès puisqu'il leur donne une grande latitude, par exemple, pour proposer des remises commerciales sans avoir à demander l'avis à l'hôtelier.
En 2023, par exemple, là où Booking a dépensé 4,5% de ses réservations brutes en publicité (essentiellement Google), l'OTA a aussi dépensé l'équivalent de 1,1% en remises directes aux clients: l'an dernier, les remises ont quand même représenté la rondelette somme de 1,7 Milliards $ (contre 337 Millions $ en 2019). Signe d'un modèle qui va dominer et d'une concurrence qui s'aiguise, l'emploi progressif de l'arme de la réduction menace encore plus les équilibres entre OTAs et hébergeurs car, in fine, elle peut donner une très forte incohérence tarifaire aux réservations "directes qui risquent d'être moins attractives que celles proposées par les OTAs.
Cependant, avant que les hébergeurs soient directement touchés par ce phénomène, ce sont principalement les chaînes volontaires d'hôtels qui seront percutées par ce modèle: en effet, pourquoi sur-cotiser à une chaîne qui va de plus en plus se faire concurrencer sur son modèle de fidélisation par les OTAs ? Il est fort probable que les adhérents de ces chaînes (voyant les coûts s'additionner et leurs marges se réduire) soient tentés assez vite de se débarrasser du partenire de trop ?
Ce phénomène est à observer de près car il semble être le "levier" dominant des OTAs pour enrayer leurs coûts marketing: en 5 ans, les remises ont augmenté de 5 fois en valeur contre seulement 1,4 fois pour le marketing "classique".
L'idée reste donc de pouvoir générer des réservations (avec les remises) et des revenus supplémentaires (avec les encaissements) pour faire face à un coût encore important des liens sponsorisés sur Google ...
Comme nous l'écrivions, déjà l'an dernier, cet état de fait ne plaide pas en faveur d'une perspective où les commissions des OTAs baisseraient ...
Cette situation milite encore plus pour que chaque entreprise touristique se donne les moyens (en se digitalisant de la tête aux pieds) de drainer le maximum de réservations directes sur son site et son moteur de réservation. Les méthodes existent et les moyens sont à la portée de tous. Celles et ceux qui les appliquent en perçoivent des résultats croissants: en général, chaque année, une entreprise touristique "déterminée" peut reprendre de 5 à 15% de ses parts de marché "en direct"; ce qui justifie la célèbre maxime de Glen Fogel, le patron de Booking: "Mon principal concurrent ? Le site du professionnel touristique en direct !"