Les OTAs ont un effet positif sur le "rural" et les "indépendants"
Souvent décriés comme des "suceuses de sang", les OTAs (Online Travel Agencies comme Booking, Expedia, Airbnb, etc) sont désormais observées avec plus d'objectivité par les autorités publiques ou encore les représentations professionnelles. La dernière étude d'Oxford Economics tend à démontrer que leur impact dans le développement du tourisme rural, d'une part, et dans celui des hébergeurs indépendants, d'autre part, est beaucoup plus positif qu'on ne l'imagine ...
Et si Booking, Expedia, Airbnb et consorts avaient eu un effet plus positif sur le tourisme rural et indépendant (une large part du tourisme européen et français ...) qu'on ne le pense ? Après tout, combien de fois n'a-t-on pas entendu dire par un hébergeur situé dans ces destinations : "À peine ouvert, je me suis affiché sur Booking et mes premières réservations sont tombées quelques heures après seulement !" ? C'est pourtant la réalité et elle témoigne de la puissance de feu de ces plateformes géantes pour générer des réservations ... tout simplement, parce qu'en quelques années, elles se sont imposées comme les premières portes d'entrée du voyage pour des millions de voyageurs dans le monde. Et la pandémie n'y aura rien changé, au contraire; ce que tend à démontrer la dernière étude d'Oxford Economics.
En résumé, en 2022, selon Oxford Economics, les OTAs:
- ont permis aux vacanciers d'économiser en moyenne 8 € par nuit,
- ont généré près de 100 millions de nuitées supplémentaires au marché hôtelier européen (contre 52,9 Millions en 2020 et 46,7 Millions en 2021),
- ont "soutenu" 238 000 emplois sur le continent en 2020, et 243 000 en 2021,
- et ont apporté 24,7 milliards d'euros de PIB supplémentaire (contre 12,9 Milliards d'euros en 2020 et 11,8 Milliards d'euros en 2021) ;
(Source : Etude Oxford Economics sur l'impact économique des agences de voyages en ligne en Europe entre 2019 et 2021).
OTA ds villes et OTA des champs
Parmi les faits les plus marquants de cette étude, on notera l'impact particulièrement positif des OTAs sur la mise en lumière (et la commercialisation) des hébergeurs situés en zones rurales. Selon l'étude, un hébergeur implanté dans une destination éloignée des grands centres urbains peut désormais augmenter ses chances de visibilité et de réservations simplement grâce aux OTAs. Ces derniers, en effet, drainent un public tellement large que leur potentiel de description vers le "rural" est sans commune mesure.
Selon l'étude, en Europe, où 75 % de la population vit dans des zones urbaines, il n'est pas surprenant que 84 % des ventes d'hébergements de voyage aient eu lieu dans les villes et les villages en 2019. Cependant, la répartition entre les zones rurales et urbaines sur les OTAs raconte une histoire différente: dans ces secteurs, en effet, les plateformes de voyage en ligne ont plus que doublé le montant des réservations par rapport à la moyenne du marché de 16 %.
Selon Oxford Economics, "en offrant plus de choix aux consommateurs, les OTAs contribuent à éloigner le tourisme des centres de population et à orienter l'activité touristique - et par conséquent économique - vers des destinations hors des sentiers battus, ce qui se traduit par une croissance localisée et la création d'emplois".
En France, par exemple, alors que le marché de l'hébergement se concentre sur l'urbain, la part de marché des hébergements ruraux représente une part 4 fois plus importante que dans la représentation "normale".
Même les campings !
Cette "prégnance" rurale des OTAs n'est pas surprenante : ces "machines de guerre de la réservation en ligne" ont vocation à proposer les inventaires les plus larges possibles (toutes destinations et tous types d'hébergement) pour satisfaire les attentes d'un public toujours plus important. Normal, dès lors, qu'elles orientent leurs conquêtes de nouveaux hébergeurs vers les destinations les plus prisées des français (comme la "campagne" après le covid).
Airbnb, comme Booking, fait de cette avancée rurale un argument politique de plus en plus employé par ses troupes françaises sur le thème de : "Grâce à nous, vous attirez de nouveaux publics sur vos terres et vous voyez s'installer des entreprises touristiques qui ne se seraient jamais risquées sans un support de distribution puissant ...". D'ailleurs, cette semaine, Airbnb rappelait que 40% de sa collecte "à la source" de la taxe de séjour s'était faite dans des communes de moins de 3500 habitants.
Autre phénomène : les campings - jusque là réfractaires aux OTAs (et tentés de se liguer par des chartes syndicales pour leur tourner le dos) - s'y mettent aussi à leur tour. En 2022, jamais comme avant, par exemple, Booking n'a eu à proposer autant de campings dans ses listings ! Signe que les OTAs ont désormais leur place dans ce milieu : cette semaine, la plateforme de réservation d'hébergement de plein air Campings.com annonçait lever 27 Millions d'euros et racheter, dans la foulée, la société néerlandaise Bungalow Booker.
Comme on le voit ci-dessous, le "rural" a pris une ascendance sérieuse durant la période covid : selon le "Rural Booking Index", le covid a carrémment fait mentir la courbe de tendance en appuyant à la hausse les réservations réalisées dans les destinations rurales. Un phénomène - pour être complet - qui, même s'il sera durable, risque de s'amenuiser quelque peu avec un retour progressif "à la normale" dans les destinations urbaines.
Les indépendants en majorité
Autre phénomène décrit dans cette étude: les OTAs assureraient la promotion des hébergeurs indépendants en priorité sur celle des adresses de chaînes. En 2021 (voir ci-dessous, les indépendants français représentaient 58% des offres présentes sur les principaux OTAs contre 41% dans la "vraie vie" (les "chaînes" selon les OTAs, comportent les chaînes "intégrées" et les "volontaires").
Les OTAs seraient-ils donc en passe de devenir les "meilleurs amis" des opérateurs indépendants ? Probablement, si l'on en croit cette étude ... et d'autres, menées par l'Europe, notamment (voir ci-dessous). Selon un sondage européen mené en 2021 auprès d'hôteliers indépendants, les OTAs seraient considérés comme des apporteurs d'affaires désormais incontournables. Pour 80% des hôteliers, ils sont désormais devenus le premier levier de génération de réservations.
Un impact ciblé
Comme nous le disons depuis toujours, "les OTAs, c'est comme le Nutella. C'est bon, mais il ne faut pas en abuser ..." à cause des coûs (commissions) qui peuvent vite s'emballer si leur importance dans votre mix-revenu n'est pas maîtrisée.
Cependant l'étude d'Oxford Economics démontre bien, à la fois, le poids relatif des OTAs et leur contribution plutôt ciblée sur l'apport de clientèle internationale.
En clair, un hébergeur qui aurait tout compris devrait gagner par lui-même - ou via des alternatives gratuite comme Google - ses clients "nationaux" et s'en remettre aux OTAs pour les clients étrangers. Tandis que la part des OTAs ne devrait plus dépasser 15% de son portefeuille si, bien évidemment, cet hébergeur faisait "ses devoirs" en matière d'auto-digitalisation de son offre ... À méditer pour 2023 où il faudra surveiller l'explosion de ses coûts d'exploitation.