Pas de trêve hivernale touristique malgré le covid

Vaccin ou pas, le post-Covid n’arrive pas. Au contraire, la "5ème vague" s'installe et laisse à craindre de nouvelles restrictions. A quelques semaines de Noël, il faut se rendre à l'évidence : le "vivre avec" s’impose, la crise sanitaire est durable. C'est en puisant dans les ressorts de 2020 (1ère vague) que l'on peut désormais mieux affronter la suite et la sortie de cette 5ème vague pour le tourisme et les loisirs ...

"Ne parlons plus de 2020 !" ... tel est le mot d'ordre dans les grandes conventions du tourisme où les grands de cette industrie veulent croire dur comme fer à une reprise ferme, prospère et irréversible. Et pourtant, les signes annonciateurs de la "5ème vague" ne peuvent plus laisser ignorer un hiver compliqué ... mais pas impossible à traverser pour les entreprises du tourisme et des loisirs. Grandes ou petites.

L'hiver et le printemps prochain relèveront donc de la "navigation à vue", mais avec des paramètres plus clairs à considérer tout de même:

  • la France, pour l'instant, se refuse à imaginer un scenario de (re)confinement; ce qui veut dire que l'Etat veut conserver aux français (seulement les vaccinés ?) une relative liberté de mouvement; dont celui de partir en vacances ou de consommer des loisirs (certes, sous condition),
  • le pass sanitaire (avec ou sans 3ème dose) va encore, et pour longtemps, s'imposer comme le sésame pour consommer ses moments de distraction (restaurant, cinémas, loisirs, transports, etc),
  • la gestion des flux (jauges, réservation en ligne pour se garantir un accès sans file d'attente, etc ...) reste déterminante pour les opérateurs qui accueillent du public,
  • le maintien de conditions de réservation souples et non contraignantes marquera la différence entre les offres que scruteront en priorité les consommateurs et les voyageurs,
  • enfin, l'État l'assure déjà: si la situation économique n'est pas totalement restaurée, des systèmes d'aides seront maintenus pour les secteurs les plus concernés (le tourisme figure au premier rang, inclusion faite des restaurateurs).

Autant le dire et mieux vaut l'admettre vite: le Covid revient ... mais, dans un contexte où l'on connaît désormais les meilleures esquives pour ne pas trop en subir les conséquences économiques.

Dans l'excellent Tourmag, son fondateur Jean Da Luz écrivait le 15 novembre: "Les professionnels ne croient plus à un retour à la normale en 2022".

La résurgence du coronavirus oblige donc l’industrie touristique à devenir - durablement - souple et réactive. Et ces réactions sont d'ordre différents que l'on soit implanté en ville, à la campagne, en bord de mer ou dans les montagnes. La souplesse et la réactivité seront donc les mots d'ordre de 2022 !

Autre facteur, les clients se sont, eux aussi, mis à la souplesse : ils savent que les règles peuvent changer du jour au lendemain, que des contraintes nouvelles peuvent apparaître, que des contrôles plus ou moins souples (sur le pass sanitaire, notamment) vont voir le jour dans d'autres domaines que les restaurants et les lieux publics. Tout le monde (entreprises et clients du tourisme) est bien préparé à réagir selon les opportunités du moment et à ne laisser passer aucune chance de pouvoir partir en weekend, en vacances ... ou de partager une expérience de loisirs à deux pas de chez soi.

Pour les prochaines semaines et les prochains mois, la meilleure solution consiste donc à ne reculer sur rien, à sécuriser tout le parcours client grâce aux outils et aux protocoles éprouvés et vivre comme si le coronavirus allait empoisonné notre vie jusqu'à la fin de 2022 au moins... En sachant, comme on le sait désormais, que l'été est désormais la période du "grand rattrappage".

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Oui, les ventes des voyagistes baissent

Pendant ce temps, la France reste la destination préférée des français et ce, en dépit d'ouvertures successives de destinations étrangères (où les conditions d'accès peuvent être assez "sportives" quand même ...).

"Il existe une dépression des ventes de voyages loisirs depuis une dizaine de jours", indiquait Jean-Pierre Mas, le 18 novembre. Le président des Entreprises du Voyage reconnaît une "reprise très forte des réservations depuis la rentrée, jusqu’à la Toussaint", suivie de réservations à des niveaux corrects pour la période de Noël, mais "très peu d’anticipations sur l’année 2022".

Ces considérations ne sont pas générales, elles ne concernent que le public français et ses désirs de voyages internationaux… mais elles expriment une crainte du lendemain. Nos compatriotes voient peser de nouvelles ombres sur leur mobilité, d’autant plus que les restrictions en cascade appliquées par de nombreux pays laissent prévoir une stratégie comparable en France.

Notre continent redevient l’épicentre de l’épidémie, l’OMS estime que le rythme actuel de transmission dans les 53 pays de la région européenne est "très préoccupant". Si les courbes continuent de monter, 500 000 décès se produiront "d’ici février". Il y aura mécaniquement une menace sur les city-breaks des fêtes de fin d’année, les séjours revigorants en campagne etc.

Mais, jusque là, en suivant les protocoles, le tourisme "domestique" devrait continuer de tirer profit de la situation.

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Un policier contrôle un pass sanitaire le 15 novembre en Autriche © APA

Un hiver sous haute surveillance partout en Europe

La flambée de coronavirus en France et ailleurs fait suite au relâchement des mesures de distanciation sociale, malgré la vaccination. Notre pays compte 75% de personnes entièrement vaccinées, selon Santé Publique France. 50 millions de Français ont été traités en moins d’un an et des dizaines de vaccinodromes ont refermé leurs portes… alors que le gouvernement reconnaît l’utilité d’une troisième dose, après le feu vert donné le 18 novembre par l’Agence européenne du médicament. Son directeur de stratégie vaccinale, Marco Cavaleri, reconnaît qu’il n’existe pas de "vaccin efficace à 100%", ce qui engage chaque pays à agir pour freiner la circulation du virus cet hiver. Or, depuis 20 mois, les tergiversations des pouvoirs publics sont une habitude à ce sujet. Le confinement des non-vaccinés n’est pas nécessaire; un postulat que la France justifie par la mise en place du pass sanitaire.

Que font les autres états européens ?

  • L'Autriche reconfine tous ses vaccinés et non-vaccinés à partir du 22 novembre et ce, pour au moins 4 semaines,

  • Allemagne : les non-vaccinés vont être exclus de certains lieux publics, la vaccination sera obligatoire pour le personnel des hôpitaux et maisons de retraite. Munich annule son marché de Noël, le télétravail est encouragé,

  • Les Pays-Bas sont reconfinés depuis le 12 novembre, jusqu’au 3 décembre, avec couvre-feu et télétravail. Dès le 4 décembre, les restaurants et lieux de loisirs seront réservés aux personnes vaccinées ou guéries,

  • L’Italie prépare la 3e dose (actuellement réservée aux personnes exposées) pour tous dès janvier,

  • L'Espagne va élargir la 3e dose à tous dès janvier,

  • Le Portugal (87% de vaccinés, une performance mondiale) prépare le retour du masque dans la rue,

  • L’Islande limite les rassemblements à 50 personnes, et fixe la fermeture des bars, restaurants et discothèques à 22h, depuis le 10 novembre. Une 3e dose de vaccin sera administrée massivement d’ici la fin de l’année,

  • Le Danemark a réintroduit le pass sanitaire le 12 novembre,

  • En Slovaquie, les non-vaccinés sont confinés depuis le 18 novembre, pour au moins 3 semaines,

  • En Grèce, les non-vaccinés sont interdits dans certains lieux fermés, hormis les restaurants, à partir du 22 novembre,

Plus loin, les US vaccinent les enfants de 5 à 11 ans depuis le 2 novembre.

Dans ces circonstances, et en voyant un tel faisceau de mesures, il serait vain de penser que la France échappera à des mesures supplémentaires et plus contraignantes.

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Ne (re)lâchez rien !

Les professionnels du tourisme ont démontré leur capacité de résilience, l’année dernière, avec le soutien des aides d’État. Pourtant, certaines prévisions étaient moroses. Ce second hiver sous Covid aura quelque chose de familier. Si ce "déjà vu" rassure, il faut lui ajouter la capacité de rebond de la France, objectivement supérieure à celle de ses voisins.

En août dernier, les recettes touristiques internationales ont présenté une hausse de 29,6% par rapport à août 2020. La baisse du tourisme étranger s'est limitée à 23,1% par rapport à août 2019, indique Atout France. L’apport international s’ajoute au matelas de notre tourisme national, qui joue parfaitement le jeu patriotique, en tenant lieu aussi de filet de sécurité. Surtout, les améliorations se sont produites malgré le Covid (ou son fantôme…).

De janvier à septembre, la France a dépassé l’Espagne (leader mondial des recettes touristiques) sur son propre terrain, avec une balance de paiements de 2,8 milliards d’euros. Une certaine continuité de résultats est à attendre.

Les hébergeurs confrontés aux bruits de l’actualité européenne ont la juste impression que l’étau se resserre, notamment en France. Le durcissement des mesures est inévitable, l’exercice des activités touristiques va redevenir un peu plus lourd. Cependant, les prédispositions françaises (par rapport aux voisins) sont encourageantes. Les hôtes ont acquis les recettes du succès depuis 2020, notamment dans la relance du tourisme domestique, local ou régional, en tout cas bleu-blanc-rouge en priorité.

Et puis, ne l'oublions pas, les revenus touristiques français (depuis toujours) sont générés à 80% par les français et, pour les 20% restants, par 80% d'européens. Le tourisme français ne s'est pas découvert une vocation "domestique"; c'est seulement que les français explorent désormais de nouveaux territoires (essentiellement, hors de villes), mais ils représentent depuis toujours le premier marché de toutes les entreprises touristiques et de loisirs française. C'est sur ces fondamentaux et une nécessaire digitalisation qu'il vous faudra travailler dès cet hiver.

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