L'investissement dans l'hôtellerie française gagne 12 % au 1er semestre
La confiance revient dans l’hôtellerie française, avec une fréquentation qui s’améliore malgré une crise sans précédent. Selon les cabinets CBRE et MKG, l'activité et es investissements seraient même en hausse de 12 % en comparaison avec 2019. Après une année 2020 en demi-teinte, le bilan prévisionnel de 2021 laisse prévoir une reprise de l’injection de nouveaux capitaux … à mesure que l’injection vaccinale progresse !
Ceux qui doutaient de la reprise "durable" en seront pour leurs frais : oui, la période n'est pas facile et prédire quand et comment tout reprendra "à la normale" n'est pas des plus aisé. Mais une chose est certaine, pour les investisseurs, il faut continuer de miser sur l'hotellerie car le marché devrait reprendre de plus belle dès que la pandémie sera terminée ou mise sous contrôle et intégrée dans notre quotidien ...
Selon le cabinet MKG, un des meilleurs observateurs français du monde de l'hôtellerie, plus de doutes ni d’incertitudes, Covid ou pas Covid, l’industrie touristique a décidé de foncer.
Il faut dire que la poussée des clients est forte, malgré la quatrième vague de Covid, les variants à l’infini, les restrictions gouvernementales etc ... Si l'incertitude régnait avant l'été 2020, en cette saison 2021, preuve est faite que l'industrie touristique n'est pas à terre et que les voyageurs profitent de tous les "interstices" pour revivre dès qu'ils le peuvent l'expérience de l'hospitalité ! Cette situation plus stable permet à l’hôtellerie française de quitter sa zone d’inquiétude, et d'aller vers la reconquête, avec un chiffre d’affaires requinqué. À date, certais hôteliers auraient même retrouvé des niveaux d'activités supérieurs à 2019 ...
En attendant la haute période du mois d’août, le taux d’occupation hôtelière (TO) se porte au mieux depuis le début de la pandémie. Il atteignait 52 % en juin, alors qu’il n’était pas repassé au-dessus de 50 % depuis 2019. Le cabinet d'études et de conseil MKG, auteur de cette estimation, observe un TO (pour Taux d'Occupation) supérieur à 60 % dans les régions de l'Ouest, mais Paris reste dramatiquement à 30 %.
La reprise, produite par le public français, se porte surtout dans l'hôtellerie économique. En juin, le remplissage représentait déjà 54 % pour les hôtels 1 étoile et 48 % pour les 2-3 étoiles et - surprise ! - même la clientèle d'affaires est également présente cet été, alors qu’elle a l’habitude de ralentir la première quinzaine de juillet. L'une des grandes chaînes hôtelières adaptées à ce profil affiche jusqu'à 15 % de clients en plus par rapport à 2019.
En matière de grandes manœuvres, l’investissement dans l'hôtellerie (campings inclus) est reparti au premier semestre en France. Le volume de transactions a atteint 976 millions d’euros, c’est-à-dire plus que pour la même période de 2019, selon le groupe de conseil en immobilier d'entreprise CBRE.
Investissements dans l'hôtellerie française | ||||
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1er semestre 2021 | 976 millions d'euros | |||
1er semestre 2020 | 634 millions d'euros | |||
1er semestre 2019 | 859 millions d'euros | |||
Ces chiffres doivent être modérés à certains égards car il existe tout de même un "effet rattrapage", du fait que le calendrier de certaines opérations a été décalé en raison du Covid. Mais la performance observée depuis le début de l’année reste, selon les observateurs, "le fruit d’un niveau de confiance rétabli dans l’industrie hôtelière".
La France est n°3 en Europe, mais le luxe peine à redémarrer
Côté dynamique, la France affiche le 3e rang européen pour le volume de transactions réalisé au cours de la première moitié de l'année, après le Royaume-Uni (1,96 milliard d’euros) et l'Espagne (1,094 milliard) pourtant plus durement touchée par la crise.
Mais tous les établissements ne sont pas égaux pour le redécollage : "La reprise du secteur hôtelier se fera à plusieurs vitesses", observe Bertrand Pullès, DG d’Extendam, leader du capital investissement en hôtellerie économique et milieu de gamme. Les enseignes de loisirs, qui avaient déjà bien résisté en 2020, sont promises à retrouver leur dynamisme d’ici 2022 ou 2023, portées par une clientèle principalement française et européenne.
Les hôtels d’affaires d’entrée de gamme devraient également se rétablir assez rapidement … mais à l’inverse, le haut de gamme et le luxe, surtout à Paris et sur la côte d’Azur, exigent une convalescence plus longue, en raison de leur dépendance plus forte envers les internationaux. Pour cette catégorie, le retour à la normale n'est envisageable que d'ici la fin 2023, voire en 2024. La niche du luxe n'est pas pour autant abandonnée par les investisseurs (voir plus bas) ...
Une logique de grands groupes
Bruno Juin, responsable France, Belgique et Luxembourg chez CBRE © CBRE
Bien sûr, le quasi-milliard d’euros d’investissement annoncé en France est l’illustration du grand business immobilier et il ne prend pas en compte les locations saisonnières et les chambres d’hôtes etc ... pour lesquelles les données sont plus difficiles à réunir. Mais, selon plusieurs spécialistes, là aussi, malgré la crise, il y a peu de fermetures à déceler et les pros observent, de-ci, de-là une revalorisation des transactions qui va de pair avec la reprise dynamique de l'activité post-3ème-vague ...
Pour les grands hôtels et les grandes transactions, la reprise du grand marché concernerait notamment le partenariat signé entre Primonial (groupe de gestion de patrimoine et d'actifs) et un autre gestionnaire, Hova Hospitality. Les 9 hôtels du groupe JJW, notamment ses établissements haut de gamme parisiens, ont fait l’objet d’un rachat. Autre signe de confiance, le Groupe Honotel acquiert le 4 étoiles niçois "Excelsior". Les transactions vont bon train pour B&B Hotels, qui prévoit l'ouverture d'au moins 70 hôtels cette année, un rythme record, le précédent étant fixé à 50. A Paris, ce groupe a remplacé un Timhotel. Parmi d’autres exemples, une holding réunissant Extendam, bpifrance et Solanet Gestion Hôtelière a pris le contrôle de 12 établissements Imberton. Les grands patrons de l'hôtellerie reconnaissent qu’il n’y a pas eu de baisse des valeurs, de sorte que le courant d'affaires est maintenu : "Il n'y a pas eu de grande braderie. Les propriétaires ont tenu grâce aux aides de l'Etat", remarque Bruno Juin, chez CBRE. Ce spécialiste du marché de l’hôtellerie prévoit d’ailleurs que le second semestre 2021 soit tout aussi porteur d’investissements que le premier.
De BFMtv à La Croix-Valmer
La valeur des murs et des fonds de commerce reste donc au niveau d'avant-la-crise et, pour certains, elles devraient même être revues à la hausse compte tenu du niveau de "résilience" démontré par certains établissements ou groupes d'établissements.
Les hôtels haut de gamme, quant à eux, qui ont été les plus touchés par la crise, risque de souffrir longtemps de l’absence des touristes étrangers. La perte de chiffre d’affaires dans ce secteur a représenté 73% en 2020, contre "seulement" 53% pour l’hôtellerie française en général.
Atout France, qui communique ces données, précise que l’hôtellerie parisienne a été "particulièrement sinistrée", avec un taux d’occupation moyen de 22,6% sur l’ensemble de l’année, contre 80% en 2019.
Heureusement, les entrepreneurs ne baissent pas les bras et misent toujours sur les établissements de luxe, en tablant sur un retour en force en 2022. Même si les 4 et 5 étoiles ont été les plus touchés, certains hommes d’affaires voient plus loin, comme Alain Weill, fondateur de BFMTV et PDG d’Altice et SFR jusqu’à ce mois de juillet. Cet acteur de la communication a investi 55 millions d’euros à la Croix-Valmer, près de Saint-Tropez, dans le rachat de trois hôtels, deux restaurants et quarante studios. Le regroupement de cet ensemble donne au 5 étoiles "Lily of the Valley", doté de suites bientôt équipées de piscines individuelles.
En rachetant Lily of the Valley (ci-dessus), Alain Weill, qui n’est pas un novice en affaires et n’a pas à démontrer son flair, a créé WMH, un groupe d’hôtellerie indépendant, uniquement positionné sur le luxe.
Vous avez dit crise ? Ce n'est pas si simple. Parmi d’autres exemples, la société parisienne Lalique SA a acquis, le 1er juillet, la totalité des parts de l'hôtel-restaurant du Château Lafaurie-Peyraguey, à 40 km de Bordeaux. Lalique Group SA, spécialisé dans la distribution mondiale de produits de luxe, s’offre un lieu riche de plus de 400 ans d'histoire, devenu un 5 étoiles estampillé Relais & Châteaux.
Château Lafaurie-Peyraguey, 33210 Bommes © Lalique Group SA
Idem, c’est après de gros travaux que le duo de créateurs-investisseurs Frédéric Biousse-Guillaume Foucher a relancé en juin l’Hôtel du Golf à Seignosse (Landes). Le slogan “70 hectares et l’océan” accompagne ce quatre étoiles. Le même tandem est à la tête d’un groupe indépendant positionné dans l’hôtellerie haut de gamme. Cet été, il réactive l’ex-résidence de Catherine Deneuve, le Domaine de Primard, en Normandie, cédé par l’actrice en 2018. Cette demeure transformée en 5 étoiles associe le luxe au mythe du 7e art … mais sur le créneau subtil du "luxe abordable", vante Frédéric Biousse.
"Luxe abordable ?" Il n'y a pas de paradoxe, juste de l'habileté ! Ce positionnement indique la voie vers une niche, réduite mais porteuse, car les clients même modestes n’hésitent pas s’offrir des séjours autrefois réservés aux publics aisés. Cette tendance à une hôtellerie presque artisanale mais haut-de-gamme est au centre des grands projets d'investissements. Chacun, à son échelle, peut y voir la tendance des efforts futurs à accomplir en vue de donner une valeur supplémentaire à son établissement ...