Impôts 2020: les revenus "AirBnB" dans la télédéclaration pour la première fois
La campagne de déclaration des revenus 2020 a été officiellement lancée jeudi dernier. Déclaration automatique, exonération des frais de télétravail ... le millésime 2020-2021 comporte de nombreuses nouveautés dont la transmission de certaines données au fisc par les places de marché et autres portails intermédiaires et, notamment, AirBnB ... À la clé, la télédéclaration automatique de près de 5 Milliards d'euros de revenus
En 2020, covid oblige, la télédéclaration a grimpé de 9 %, touchant près 75% des foyers fiscaux français. Cette année, cette part devrait encore augmenter et, pour les adeptes de la télédéclaration, les dates limites s'échelonneront entre le 26 mai et le 8 juin, en fonction des départements. Pour les autres, les nostalgiques de la "version papier", la date limite est fixée au 20 mai.
Une des nombreuses nouveautés du nouveau millésime porte sur vos revenus "locatifs" (de courte durée); en particulier, si vous les avez réalisés via une grande plateforme comme AirBnB ou toute autre plateforme de "l'économie collaborative" comme le précise l'administration fiscale.
Pour la première fois, en effet, vous retrouverez - pré-remplis dans votre déclaration - les revenus réalisés via AirBnB et que la plateforme (mais aussi, ses "consoeurs") aura télétransmis à l'administration fiscale. Selon Bercy, les montants en question s'élèvent à 5 milliards d'euros et sont perçus par 1,8 million de particuliers et 850.000 professionnels.
Cette "nouveauté", annoncée en 2019 dans le cadre de la nouvelle loi de lutte contre la fraude fiscale, oblige toutes les plateformes dites de l'économie collaborative (AirBnB, HomeAway, etc...) à transmettre, une fois par an, l'état des réservations réalisées pour le compte des particuliers ou des professionnels sur leur site.
Cette mesure ne concerne pas que les plateformes liées au tourisme: toutes les plateformes, sans exception (c'est le cas aussi pour les plateformes de livraison de repas ou encore des sites comme Drivy, etc ...), sont désormais soumises à cette obligation.
Les "petites annonces" encore épargnées ...
Toutes ? Pas vraiment ! Si la plateforme encaisse l'argent, elle tombe sous le coup de l'obligation. Si cette dernière se contente de diffuser une petite annonce et que la réservation se fait directement entre l'internaute et l'hébergeur, la plateforme (qui, en principe, n'a pas connaissance de transaction) n'a donc aucune obligation de transmission. Certains sites, comme LeBonCoin par exemple, ne seraient donc soumis que partiellement à cette obligation; c'est-à-dire, uniquement pour les annonces dont la réservation se conclue sur son site et non pas pour les annonces qui renvoient l'hébergeur et le voyageur à faire "leur business" de gré à gré, hors du site LeBonCoin ...
Compliqué ? Pas vraiment ! Mais, ce "trou de souris" risque d'inciter certains propriétaires à s'en tenir à la bonne vieille petite annonce. Le pari reste toutefois périlleux pour, au moins, deux raisons.
... mais pas totalement hors-de-contrôle !
D'abord, "la petite annonce" en tant que telle n'est plus aussi attractive qu'auparavant. Dans le tourisme, du moins, les arnaques aux petites annonces sont telles que les voyageurs préfèrent, de loin, faire une réservation en bonne et due forme, via un système de paiement sécurisé (plutôt que de donner leur carte bancaire au téléphone à un parfait inconnu) et sous l'égide d'un site qui a "pignon sur rue" et qui, dès lors, apporte sa "garantie" à la réservation.
S'en tenir à la petite annonce, obliger l'internaute à vous écrire ou à vous téléphoner et "batailler" le temps qu'il faut pour s'apporter mutuellement un minimum de confiance est un exercice que de moins en moins de voyageurs (et d'hébergeurs) veulent commettre. Dès lors, en s'en tenant à la petite annonce, le propriétaire prend le risque de se voir passer un bon paquet de réservations sous le nez ...
Ensuite, s'en tenir à la petite annonce en passant que l'on échappe aux radars du fisc est un calcul très imparfait: depuis cette année, grâce à un décret publié depuis février dernier, les outils d'intelligence artificielle du fisc sont autorisés à recenser toutes les offres publiées en ligne, d'en identifier le propriétaire et de vérifier dans ses déclarations si des revenus locatifs "cohérents" y ont été déclarés... Dans le cas contraire, il est fort possible que l'administration fiscale soit tentée de demander quelques explications au passage. Et, inutile de répondre qu'il s'agissait d'amis ou de cousins à qui le bien a été prêté à titre gracieux: l'intelligence artificielle sera aussi capable de recenser les avis écrits sur votre bien par vos "cousins et amis". Et, grâce à la puissance illimitée de ses serveurs, ces contrôles pourront toucher des milliers de contribuables à la fois.
Selon Jérôme Fournel, le patron de ce service fiscal, déjà fin 2019, 25% des contrôles fiscaux étaient inspirés par les premiers essais de recours à l'intelligence artificielle. C'est dire si, avec ce décret, l'administration disposera d'un arsenal encore plus puissant pour déceler plus de cas "douteux" et donc, engager encore plus de contrôles fiscaux.
Pour ceux, professionnels déguisés ou particuliers arrondissant leurs fins de mois, qui omettent aujourd'hui de déclarer ces rémunérations, l'atterrissage s'annonce brutal ... au grand réconfort des hébergeurs "marchands" comme les hôteliers, les campings, les maisons d'hôtes et les gîtes ... qui commençaient à se sentir désarmés face à la concurrence des "locations sauvages" qui ont fleuri
sur de nombreuses plateformes d'économie "collaborative"...
Avec ces mesures, les professionnels du tourisme devraient ainsi regagner en compétitivité, et les entreprises telles que AirBnB regagner en respectabilité. Le procès fait, en 2017, à la carte prépayée de la plateforme (retirée depuis), suspectée de faciliter la fraude fiscale, n'aura donc plus lieu d'être.
En conséquence, la petite annonce, non seulement, ne vous garantit pas de "passer sous les radars", mais de plus, elle vous fait potentiellement perdre des clients ... autant, passer au stade supérieur et adopter la réservation instantanée et en ligne; ce que LeBonCoin, toujours lui, propose de plus en plus à "annonceurs". L'évolution est toute tracée ...
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