AirBnB bloquera bien les annonces dans neuf villes françaises
Finalement, AirBnB prend les devants : la plateforme vient d'annoncer qu'elle bloquera sur son site les annonces de locations saisonnières qui n'auront pas été préalablement enregistrées dans les mairies de leur ville d'établissement. La décision de la plateforme américaine est pionnière et va certainement donner le "La" d'une mise en conformité d'autres sites d'annonces comme HomeAway ou encore LeBonCoin ... En tous les cas, c'est un joli coup de good buzz que vient de lancer AirBnB !
Depuis 2017, la loi française permet, en effet, aux villes de plus de 200.000 habitants d'imposer l'inscription en mairie de toute activité de location saisonnière: cette loi, jusque là peu appliquée, permet de tracer qui loue quoi dans une ville et de pouvoir placer face à leurs obligations les loueurs de "meublés" devenus, en quelques années, la "bête noire" des hôteliers et des maisons d'hôtes. Elle permet, entre autres, de vérifier avec plus de facilité si un loueur respecte le fameux délai des 120 jours de location ou s'il s'acquitte de ses obligations fiscales (notamment sur la taxe de séjour)...
Mais il faut reconnaître que, Paris mis à part, peu de grandes villes prenaient vraiment les choses en mains sur le sujet. Or, dans un contexte de très grande tension économique, gouvernement et élus locaux ne sont pas insensibles aux pressions des syndicats professionnels (hôteliers, entre autres) qui, outre les mesures de soutien et de relance, réclament - légitimement - à corps et à cri que les pouvoirs publics fassent le nécessaire pour que cesse la jungle concurrentielle qui règne dans les grandes villes entre hébergements "marchands" et locations meublées ...
La solution - le grand pas - vient donc finalement d'AirBnB : selon la ministre du logement, "AirBnB a annoncé, désormais, veiller à ce que les logements loués en courte durée sur son site soient préalablement enregistrés auprès des autorités locales qui le demandent ...".
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La décision d'AirBnB est d'application quasi-immédiate puisque, selon le ministère du logement, elle devrait s'appliquer dès le mois d'avril prochain sur les annonces de sa plateforme concernant les villes de Paris, Bordeaux et Lyon. Suivront, après l'été, Lille, Marseille, Nantes, Nice, Strasbourg et Toulouse. Dès lors, un propriétaire qui ne pourra pas justifier d'un numéro d'immatriculation auprès de sa commune sera banni des pages de AirBnB et, pour un nouveau venu, toute inscription deviendra carrémment impossible ...
Nul doute que cette mesure prise - volontairement - par AirBnB fera couler beaucoup d'encre dans les prochains jours: d'abord, parce qu'elle met une sacré pression sur les autres plateformes d'annonces comme HomeAway-Abritel ou encore LeBonCoin (mais aussi Booking, qui propose de plus en plus d'annonces de locations) qui vont devoir aussi "jouer les bons élèves" au risque d'être sitgmatisées par les autorités politiques et la profession hôtelière; ensuite, parce que les autorités locales risquent de prendre une pression supplémentaire de la part de leurs hôteliers pour accélérer le mouvement et renforcer les contrôles en vue de leur donner des signes encourageants face à la tension économique rencontrée ... Le Parlement, aussi, devrait subir une nouvelle pression des hôteliers qui envisagent sérieusement demander à ce que l'obligation d'inscription en mairie ne se fasse pas uniquement dans les villes de 200.000 habitants et plus ... mais, dans toutes les communes de France quelque soit leur taille. Après tout, les hôtels n'échappent pas à leurs obligations légales dans les villes de moins de 200.000 habitants ... Nul doute que ce dossier est loin d'être refermé.
AirBnB s'apprête à amplifier son "arsenal de bon élève" auprès des autorités locales et envisagerait de déployer, sous peu, à leur attention, un portail leur indiquant, pour leur commune, la nature des propriétés référencées (sous quel numéro d'enregistrement, pour quel propriétaire, pour combien de nuitées enregistrées afin de contrôler la limite des 120 jours par an ...). Ce sujet donnera lieu à un vaste chantier puisqu'il s'agira aussi de "croiser" les informations avec les autres plateformes concurrentes sur lesquelles, en général, les propriétaires se distribuent simultanément. L'idée - sous le leadership apparent de AirBnB - est de donner aux collectivités une information précise sur qui loue quoi, combien de temps, sous quel statut, etc ... afin que cesse, progressivement, l'opacité qui domine l'univers de la location saisonnière ... du moins, telle qu'elle s'est développée de façon anarchique ces dernières années.
L'initiative d'AirBnB n'est pas dénuée de sens: jusqu'à présent, dans sa course folle à la croissance, la plateforme californienne s'était attirée l'inimitié de nombreuses autorités locales (en France et ailleurs, y compris aux US, sa patrie) et faisait régulièrement face à des procédures juridiques couteuses et incertaines. Désormais, parce que le marché atteint son niveau de maturité et que l'entreprise est cotée en bourse, ses démarches s'inscrivent dans un cadre plus conventionnel avec les autorités publiques. Le fait de prendre ses concurrents de court est également très malin: en prenant cette initiative, AirBnB oblige tous ses concurrents à faire de même et donc, à évoluer sur le marché en s'imposant les mêmes contraintes d'évolution ... tout en se rétablissant dans une bien bonne image.