Dans le secret des classements des OTAs : une première étude européenne

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C'est certainement la première étude du genre: est-ce qu'un facteur en particulier fait que votre hôtel occupe une place plus ou moins haute dans les listes de résultats des OTAs. Menée à l'aide de très savants calculs, l'étude démontre que vous pouvez pratiquer des tarifs différents entre votre site et les OTAs, mais aussi entre les OTAs eux-mêmes ... mais avec modération !

Avec son nom court et tonique - ZEW (pronocez zou!) - le Leibniz-Zentrum für Europäische Wirtschaftsforschung ou Centre Européen pour la Recherche Economique, pourrait presque passer pour une startup ! C'est, en fait, un des centres de recherche sur l'économie les plus reconnus en Europe et dans le monde, fréquenté par de nombreux "docteurs" et "professeurs" au chevet de l'économie du Vieux Continent.

Leur dernière recherche portent sur un sujet qui nous tient à coeur : Comment les OTAs classent tel ou tel établissement dans leurs listes de résultats ? Et il faut avouer que les résultats sont plus qu'interessants ...

Des critères assez proches d'un OTA à l'autre

Certains pensent, en effet, que le classement serait lié aux prix, d'autres à la commission plus ou moins élevée qu'accepte de payer l'hôtelier ou la maison d'hôtes, à la note globale donnée sur les avis ... pour ZEW, le classement est surtout lié aux prix pratiqués par les établissements sur les différents OTAs et donc, à la cohérence tarifaire qu'ils affichent d'un portail concurrent à un autre.

Et pour les chercheurs du ZEW, plus vos prix sont différents (et donc, meilleur marché ailleurs), plus vous risquez de vous retrouver en bas de liste chez les OTAs.

"Nous nous sommes posés la question de savoir si les OTAs classent les hôtels moins bien dans leurs résultats si ceux-ci facturent des prix inférieurs sur d’autres OTAs ou sur leur propre site Web, souligne Matthias Hunold, un des trois chercheurs en charge de l'étude.

Pour Matthias Hunold, un des trois chercheurs du ZEW, à l'origine du rapport, le facteur de la disparité tarifaire a moins de conséquences chez Booking que chez Expedia.

Et pour les chercheurs (voir les formules plus bas) qui ont analysé des millions de prix et de classements pour des milliers d'hôtels européens sur une quarantaine d'OTA (dont les plus importants, évidemment), il n'y a plus de doutes : oui, si votre établissement est moins cher ailleurs, l'OTA vous pousse dans les profondeurs de ses classements.

Si ce critère était au centre de leurs recherches, les professeurs d'économie ont accumulé de savants calculs pour déterminer sur quels critères, selon eux, telle ou telle adresse remontait de telle place à telle place (ou page).

L'étude de ZEW est robuste et les formules mathématiques nombreuses pour aboutir à des conclusions sans appel: le facteur le plus déterminant de votre classement tient à l'élasticité tarifaire de vos offres d'un site à l'autre.

Pour les chercheurs du ZEW, il existe plusieurs "déterminants" d'un OTA à l'autre pour définir quelle place votre établissement doit occuper dans leurs listes. Selon les chercheurs, les deux principaux OTAs (Booking et Expedia) utiliseraient des "déterminants" similaires mais auxquels ils accorderaient un poids différent :

  • quel prix vous accordez à l'OTA et quelle est sa "distance" avec le prix le plus bas que vous pratiquez ailleurs,
  • êtes-vous ou non un "sponsor" de l'OTA (Sponsor Ad chez Expedia ou Prefered Partner chez Booking),
  • quelle note les clients de l'OTA vous ont donné,
  • combien de réservations avez-vous généré chez l'OTA les 3 derniers jours,
  • quel est votre taux de "sold out", c'est-à-dire le nombre de fois où votre hôtel était fermé (pour cause d'indisponibilité) dans les listings de l'OTA,
  • quels volumes de recherches sont réalisés sur votre hôtel et votre destination sur Google Trends,
  • quelle est la part supposée de réservation directe et de réservation réalisée via l'OTA,
  • puis, celle réalisée (estimation) entre un OTA et ses concurrents,
  • quelle est votre part de disponibilité, etc ..

De la (dis)parité oui, mais à modérer ...

D'après les chercheurs, ces déterminants sont définis en temps réel et permettent aux OTAs d'ajuster au jour le jour - voire plusieurs fois par jour - les listes d'hôtels et de maisons d'hôtes proposées à leurs visiteurs...

Toutefois, leur étude démontre que, d'un OTA à l'autre, la réaction aux fluctuations de tarifs n'est pas la même.

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Les OTAs sont attentifs, en priorité, à votre positionnement tarifaire :

* le prix que vous leur communiquez versus celui que vous pratiquez chez vous, en direct,
* le prix que vous leur communiquez et que vous pratiquez ensuite avec leurs concurrents,

Selon les chercheurs, et contre toute attente, un OTA ne vous "sanctionnera" pas si vous pratiquez un meilleur prix chez vous (sur votre site) que sur le leur et cela, même dans les pays où les lois anti-parité tarifair ne sont pas en vigueur.

Une affirmation - étayée par d'impressionnants calculs mathématiques - qui tordent le cou à la "légende urbaine" selon laquelle "si on vend moins cher sur son site, on se fait déclasser par l'OTA ...". En fait, non ! Pour ceux qui ont pris de l'avance, continuez donc à afficher les "Meilleurs Prix Garantis" sur votre site car cela ne vous pénalise pas sur les OTAs ... à condition de rester soft.

Car, il y a une limite toutefois: selon les chercheurs, si cette différence ne dépasse pas 10%, le relèguement en fond de liste est un risque plus limité, voire nul, selon leurs relevés. Même si cet écart se caractérise entre deux prix que vous envoyez entre deux OTAs différents.

En clair, vous pouvez donc appliquer une (dis)parité tarifaire non seulement parce que c'est la loi mais il semble que les OTAs ne vous en tiendront pas rigueur si vous n'avez pas la main trop lourde. Un exemple : une nuitée vendue chez vous à 100€ devrait ne pas s'afficher à plus de 110€ sur un OTA pour vous garantir de rester dans les hauts de liste ...

Selon une récente étude européenne, seulement 27% des hoteliers pratiquaient la (dis)parité tarifaire alors que la loi les y autorisait. Un des arguments avancé par les 73% qui ne la pratiquent toujours pas était la peur des représailles des OTAs:


Résultats de l'étude européenne conduite auprès de 16.000 hôteliers. Pourquoi ne pratiquez-vous pas de meilleurs prix sur votre propre site ?

Booking plus magnanime qu'Expedia

Autre facteur analysé par les chercheurs, il semble que le risque de déclassement soit moindre si - alors même que vous pratiquez une (dis)parité tarifaire "soft" - vous êtes un produit plutôt bien vendu par l'OTA. En clair, plus vos chambres sont bien positionnées en prix et sur les listes des OTAs et plus l'OTA gagne de l'argent grâce à vous, plus sa tolérance à vos (dis)parités sera grande ...

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A ce jeu-là, les chercheurs ont constaté que Booking serait même plus magnanime qu'Expedia: "Booking nous semble plus prudent à ce jeu-là certainement en raison des engagements pris vis-à-vis des autorités européennes. Il semble établi qu'ils ne sanctionnent pas aussi durement un hôtelier qui n'applique pas une stricte parité tarifaire avec lui ..." concluent les auteurs de l'étude scientifique.

Une logique commerciale pour les OTAs, une interrogation pour les consommateurs

L'objet de cette étude n'est pas de juger les pratiques commerciales ou les rapports entre les hôteliers et les OTAs mais d'identifier et d'évaluer le fait générateur - "déterminant" comme ils disent - du classement d'un hôtel ou d'une maison d'hôtes sur les pages des OTAs.

Ce classement est-il lié à la qualité de votre établissement, à la commission payée à l'OTA, aux avis, etc ?.. On voit bien que ce sont des éléments importants mais ils ne sont pas les plus importants. Votre logique et votre fairplay tarifaire sont clairement les principaux facteurs; calculs savants à la clé !

Selon les chercheurs, ces classements opérés par les OTAs semblent "commercialement" logiques: en effet, l'OTA est une entreprise comme une autre qui doit gagner de l'argent. Si elle présente des offres qu'elle sait notoirement moins intéressantes que chez ses concurrents, elle prend le risque que le client aille réserver ailleurs. C'est pour cela que, pour se prémunir contre ce risque, elle préfère présenter plus loin des établissements dont elle sait qu'elle ne dispose pas des meilleurs prix.

Sur un plan un peu plus éthique ou politique, les auteurs de l'étude s'interrogent sur la nécessité de légiférer pour imposer aux OTAs d'expliquer comment elles définissent leurs classements ou sur quels critères tel ou tel hôtel est "Recommandé" ou encore pourquoi il figure dans "Nos Meilleurs Choix". Pour les chercheurs, quand ces offres apparaissent en tête de liste, ce n'est pas pour maximiser le rapport qualité-prix du consommateur (puisque les hôtels qui seraient moins chers ne sont pas forcément placés à cet endroit) mais bien pour accroître les bénéfices de l'OTA.