Les amendes "anti-AirBnB" sont gelées

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Le Tribunal de Grande Instance de Paris a suspendu le recouvrement des amendes infligées par la Ville de Paris à un "loueur présumé illégal" (selon les critères de poursuite appliqués par l'équipe anti-fraude de la Ville de Paris). Pour l'instant, tous les loueurs verbalisés par la Ville peuvent aussi demander la suspension du paiement de leurs amendes. Mais cela risque de n'être que temporaire...

À l'origine de cette décision, la plainte d'une SCI que la Ville accusait d'avoir transformé des appartements destinés à la location longue durée en appartements destinés au marché du locatif courte-durée de type AirBnB. Et de lui adresser une coquette amende de 50.000 € ... que la SCI s'est empressée de contester.

Pour l'instant, les deux parties s'opposent toujours sur le fond:

  • la Ville de Paris argue du fait que la SCI aurait du se conformer à la loi du 6 juillet 1989 relative au code de la construction et de l’habitation qui énonce que, dans les villes de plus de 200.000 habitants, le changement de destination d'un bien vers une autre destination doit faire l'objet d'une déclaration en mairie et, dans le cas de Paris, doit entraîner la compensation des mètres carrés de logement perdu en de nouvelles surfaces destinées à l'habitat permanent ... L'absence de déclaration (et donc, de compensation) est donc à l'origine de l'action menée par la ville et de l'amende infligée ... La mairie s'appuie sur le fait que la SCI a transformé des biens réputés pour l'habitat permanent en biens destinés à la location saisonnière; ce que lui conteste la SCI... Ce biais est important car il est l'une des armes les plus redoutables de son arsenal anti-resquilleurs ...
  • pour la SCI, en effet, le doute demeure. Et elle a, de facto, interrogé la justice sur le fait de savoir si cette loi (et donc, l'obligation qui en découle) s'applique réellement quand on passe d'un bien destiné à l'habitat permanent à ce même bien ... mais loué en habitat saisonnier. Et si la loi ne s'applique pas, en fait, aux seuls cas où un appartement, par exemple, est transformé en bureaux ou en surface commerciale ...

Le doute étant permis et, surtout, au regard de la réglementation européenne, la SCI a porté le fer en justice et a demandé à un magistrat du TGI de dire le droit; notamment au regard du droit européen et de la directive de 2006.

Pour la SCI, la loi française et, donc l'application stricte qu'en fait la Ville de Paris, pourrait en réalité entrer en contradiction avec la directive européenne régissant la libre circulation des services. Le TGI a prudemment décidé de surseoir sa décision (et de suspendre le recouvrement des amendes) en attendant une décision de la cour de justice européenne.

Nouveau call-to-action

Pour l'heure donc, les quelques dizaines de propriétaires parisiens verbalisés par la Vile de Paris, pourraient s'appuyer sur cette décision de justice pour demander aussi la suspension du recouvrement des amendes dues. Mais cela ne sera que temporaire puisque le TGI a reporté sa décision au 10 décembre prochain ...

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La Ville de Paris - qui reste un fer de lance des mesures anti-locations-de-courte-durée en Europe et dans le monde - n'a pas manqué de réagir : "C’est une suspension, pas une annulation, a réagit l'adjoint Ian Brossat.Nous sommes donc confiants.Ceux qui fraudent seront condamnés. Nous allons donc poursuivre les contrôles et préparons une plainte contre les plateformes qui ne respectent pas la loi».

A Paris, donc, pas de répit ! Les chiffres des amendes infligées depuis 2016 ne cessent de progresser. Sa brigade d'inspecteurs "aligne à tour de bras* les amendes contre les loueurs resquilleurs :

  • quand une annonce ne comporte pas de numéro d'enregistrement en mairie,
  • quand le bien est loué plus de 120 jours par an, etc ...

Au total, selon les différentes estimations, les amendes seraient passées de 500.000€ en 2016 à plus de 2 Millions d'euros en 2018. Et 2019 s'annonce déjà comme un "grand cru" pour les experts ...