1,3 millions de vacanciers français manqueront-ils à l'appel cet été ?

Selon Didier Arino, le patron du cabinet Protourisme, si 74% des français (contre 75% l'an dernier) sont convaincus de partir en vacances cet été - ce qui est un taux de départ plutôt stable - plus d'un million d'entre eux manqueront à l'appel des hébergements marchands (hôtels, gîtes, campings ...). S'il reste quand même 24,1 millions de clients potentiels pour les "hébergeurs marchands", cela signifie que 36% des français (contre 38% l'an dernier) leur resteront fidèles mais pas à n'importe quelles conditions (voir plus loin)...

Comme chaque année à cette époque, les experts des cabinets spécialisés trustent les traditionnels reportages télés sur les départs en vacances des français (leurs intentions, leurs destinations, leurs envies de consommer ...). Et Didier Arino est l'un de ceux que l'on voit le plus souvent dans ces cas-là; une sorte de Monsieur Météo des départs en vacances des français, en quelque sorte ! Selon les medias qui l'interrogent, même si l'actualité principale reste largement dominée par le contexte politique, il se peut que cette situation impacte aussi les intentions de départs (et de dépenses !) des français. Et pour cause, selon le cabinet Promotourisme, entre la météo capricieuse du mois de juin et le "contexte particulièrement angoissant qui ressort des élections européennes et législatives", le temps n'est pas vraiment à l'insouciance des vacances.

Deuxième facteur et pas des moindres: en dépit d'une inflation bien plus modérée (dont nous avions annoncé le niveau lors de notre webinaire des Prédictions 2024 en janvier dernier !), il semble que le porte-monnaie des français soit également en berne et que, par conséquent, cela accentue leur propension à faire des économies sur leur logement de vacances en recourrant à des visites chez les cousins plutôt que chez l'hôtelier ... Pour plus de 1,3 millions de français (c'est l'estimation donnée par Protourisme suite à ses propres enquêtes), il semble en tous les cas, que ce soit le postulat de ce début d'été.

Si 200.000 français de moins que l'an dernier, au total, affirment ne pas partir "du tout !" en vacances pour des raisons budgétaires principalement, parmi ceux qui partent donc, 1,3 millions affirment envisager de faire une croix sur un "hébergement marchand". En même temps, rien n'est perdu ... car ces derniers (on le voit sur les autres études conduites sur les réservations du moment, lire notre article) restent encore en veille de trouver de bons prix, de bonnes offres (en valeur, lire notre article) et de meilleures conditions de paiement comme le "3 fois sans frais" dont les publicités (pour se financer les vacances) inondent les écrans télés depuis quelques jours.

Depuis cet hiver déjà, Pierre & Vacances "assouplit" le budget vacances de ses clients en proposant le "3 fois sans frais" en partenariat avec Floa Bank

Depuis quelques semaines, la chaîne de campings Siblu multiplie les appels du pied pour payer son séjour au camping en 3 ou 4 fois et s'autoriser à partir plus facilement en vacances.
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25% des juilletistes n'ont toujours pas réservé en attendant de voir les offres de dernière minute: pour l'heure, selon le cabinet Protourisme, plus de 1,8 millions de français n'ont toujours pas réservé leur séjour alors qu'ils envisagent bien de partir ce mois de juillet ! L'enjeu est important pour les hébergeurs français car les voyagistes spécialisés sur l'étranger affûtent leurs dernières promotions pour capter aussi cette clientèle massive qui fait aujourd'hui défaut dans les plannings d'arrivées des gîtes, des hôtels, des maisons d'hôtes et des campings français.

Vacanciers de villes, vacanciers des champs

Selon l'étude de Protourisme, la baisse des départs et des achats de séjours en "hébergement marchand" touche principalement les vacanciers qui résident habituellement en zones rurales ou dans les villes moyennes. Typiquement, les artisans, les agriculteurs, les commerçants et les salariés touchant entre 1 et 1,6 fois le smic, restent les vacanciers les plus pénalisés. L'écart entre leur taux de départ et celui des employés du service public ou encore ceux des grandes entreprises s'est même creusé de 12 points par rapport à l'an dernier ...

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Le train - aussi - attend ses réservations de dernière minute ! En ce premier week-end de départs en vacances, la compagnie nationale reconnaît aussi ses difficultés à remplir ses trains. Il lui resterait, en effet, plus de 40 % des billets en vente pour le mois de juillet qui n'ont pas encore trouvé preneur (et 75 % pour le mois d’août). À date, la SNCF annonce avoir vendu seulement un tiers des billets disponibles pour la période de vacances estivales ... Mais, à ce stade, pas encore d'inquiétude profonde pour ses dirigeants: "les clients ont pris l’habitude de prendre leurs réservations avec une anticipation moyenne entre quinze jours et un mois avant les voyages". La "dernière minute" affecte donc toutes les composantes du tourisme français.

Des départs plus importants à l'étranger

Paradoxe de cette situation, selon Protourisme, 500.000 français de plus partiraient cet été dans les destinations (essentiellement "soleil") à l'étranger. Au total, ces destinations devraient donc "aspirer" 10 millions de voyageurs français (contre 31,3 millions qui resteront au pays mais seulement 24,1 millions qui s'offriront un hébergement "payant" dans l'hexagone); une certaine idée de la préférence nationale manifestement ...

Cette vague devrait essentiellement concerner les habitants des "grandes villes" et notamment celles du secteur francilien qui devraient être 40% à envisager un séjour à l'étranger selon Protourisme, pour 36% des habitants des villes moyennes, 20% des habitants des "petites villes" et -3% des villages ruraux.

Grand écart budgétaire

Ceci étant dit, selon le cabinet parisien, "ceux qui partiront à l'étranger dépenseront 7% de plus sur leur budget tandis que ceux qui resteront en France réduiront leur budget de 6% !"; soit 3730 euros (de budget d'hébergement pour ceux qui partiront à l'étranger) contre 1725 euros pour ceux qui resteront en France (soit 140 euros de moins qu'en 2023).

Il faut dire que pour 34% des français, l'inflation est la première cause de coup de ciseau à leur budget vacances (10% seulement le voient en hausse et 56% pensent pouvoir le maintenir au niveau de l'an dernier). Dans tous les cas, les vacances d'été restent un must have" et nombre de français affirment avoir fait des arbitrages comme jamais: en sortant moins dans les restaurants et les lieux de loisirs ces derniers mois, en réduisant leurs escapades de weeekend pour préserver leur budget estival, toujours selon Protourisme.

Pour ces spécialistes qui auscultent les vacances de français depuis des années, "jamais les écarts de taux de départ n'ont été aussi forts entre une France modeste, rurale et périphérique et une France urbaine de centre-ville, de cadres de grandes entreprises et de la fonction publique !". Selon Didier Arinon: "Après avoir puisé dans leurs économies les années précédentes, la majorité des français a du mal à accroître son budget vacances; ce qui rend compliqué l'adéquation entre le désir des vacances et les prix pratiqués par les opérateurs".

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Booking avait observé ce phénomène il y a 2 mois déjà ... La réservation plus-que-tardive des voyageurs français ne s'est pas accentuée en raison, seulement, du contexte electoral. Selon une étude menée par Booking.com et Harris Interactive en avril dernier, déjà, "seuls 58 % des spectateurs français qui comptaient assister aux compétitions sportives en Île-de-France et qui envisageaient un hébergement payant avaient déjà réservé leur hébergement (52 % pour ceux qui se rendent dans d’autres villes hôtes)".