Airbnb croit plus aux loueurs individuels

Le propos d'Ellie Mertz, la CFO (Chief Financial Officer ou Directrice financière) d'Airbnb risque d'en faire tiquer plus d'un ... selon cette proche du fondateur d'Airbnb, "il existe une présomption selon laquelle les hôtes professionnels offrent une meilleure qualité que les hôtes individuels. Mais ce n’est pas entièrement prouvé par les données...". De quoi susciter l'émoi dans de nombreuses conciergeries ...

C'était le 30 mai dernier à Bernstein, lors de la 40ème "Conférence annuelle sur les décisions stratégiques" et le propos de la chef des finances d'Airbnb a quelque peu secoué l'assistance ... convaincue que l'avenir de la location de courte durée passerait probablement par une intense professionnalisation de l'accueil et de la gestion comme en témoigne l'essor majeur des (nouvelles) conciergeries des deux côtés de l'Atlantique.


Ellie Mertz, directrice financière d'Airbnb

Selon cette proche du big boss d'Airbnb, les loueurs individuels constituent un meilleur avantage (pour le marché, son entreprise et sa marque) que les loueurs professionnels; ce qui est aussi une manière de se démarquer de ses principaux concurrents en ce domaine que sont Vrbo (filiale d'Expedia) et Booking qui, pour nourrir leur croissance dans ce secteur si prisé, se sont essentiellement appuyés sur des conciergeries (aux US, elles peuvent gérer plusieurs centaines de biens) ou des agences immobilières.

Pour Airbnb, "small is beautiful" et l'avenir doit donc s'appuyer sur cette "source" presque infinie d'offres et de "petits propriétaires" que sur des "grosses machines" dont la directrice financière affirme qu'elle ne garantisse pas, à tous les coups, une meilleure qualité d'accueil pour les guests (les clients) de sa plateforme.

De tout manière, à ce jour, 70% des offres présentes sur Airbnb proviendraient de loueurs individuels plutôt que de conciergeries ...

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La conférence annuelle sur les décisions stratégiques de Bernstein, qui en est donc à sa 40e édition en 2024, est un événement économique majeur où des dirigeants d'entreprises de divers secteurs se réunissent pour discuter des tendances stratégiques et des perspectives économiques. L'événement attire des PDG, des directeurs financiers et d'autres cadres de haut niveau qui partagent leurs visions et leurs plans futurs.

Ce type de déclaration en dit long sur la manière dont le marché va se structurer derrière les grands portails et la position d'Airbnb peut se comprendre de plusieurs manières:

  • d'abord, cela semble réellement un fait pour ses cadres, "la professionnalisation, longtemps considérée comme essentielle à l'expansion du secteur, n'est plus aussi déterminante" que durant les phases de croissance où les plateformes cherchaient à faire grossir leurs "catalogues" à tout prix ... Le risque, pour des marques comme Airbnb qui continue de miser sur l'image de l'accueil "chez les locaux", est effectivement de voir son produit et sa promesse se standardiser alors que Brian Chesky rappelle souvent la philosophie de départ de son entreprise "Book rooms with locals rather than hotels" (Réservez des chambres ches l'habitant plutôt que chez l'hôtelier) reste valable. Avec des produits et des services trop professionnalisés, Airbnb prend donc le risque de dériver un peu trop loin de son positionnement d'origine ...

  • il y a ensuite une forme de réaction à cette professionnalisation qui a pu, aussi, notamment aux US, n'être que le corollaire d'une large spéculation immobilière que les autorités publiques combattent de plus en plus froidement. En raison de cette spéculation, de nombreuses villes déplorent un manque d'offres "à l'année" et veulent ainsi décourager les propriétaires (par un recours facilité aux services de conciergerie) de sortir trop de biens du réseau locatif de courte durée. La position de la directrice financière d'Airbnb pourrait aussi, par conséquent, être interprétée comme un gage donné aux dirigeants européens sur l'intention de moins encourager les initiatives de professionnalisation qui concourrent, toute proportion gardée, à cet essor de la location de courte durée que combattent de plus en plus de pouvoirs publics ...

  • d'autre part, il semble que les "individuels" soient plus fidèles à la marque Airbnb et ne cherchent pas forcément à se vendre "ailleurs": selon elle, les hôtes individuels ont plus tendance à accorder une forme d'exclusivité de leurs offres à Airbnb, tandis que les gestionnaires immobiliers professionnels (rental property manager) les répertorient régulièrement sur plusieurs sites.

Enfin, revient aussi la question de la "qualité du service" qui n'est pas - selon Ellie Mertz - aussi évidente que cela dès lors que l'accueil et la gestion sont opérés par un professionnel au lieu du particulier. Selon cette dernière, cela se perçoit souvent dans les chiffres, son domaine de prédilection ...

Des notes qui dénotent

À Bernstein, donc, Ellie Mertz a déclaré que la "présomption selon laquelle les hôtes professionnels offrent une meilleure qualité que les hôtes individuels n'est pas entièrement soutenu par les données".

Selon cette dernière, les hôtes "individuels" reçoivent généralement des notes plus élevées que les professionnels.

Pour Airbnb, jouer la carte du propriétaire individuel (versus le gestionnaire de propriétés) reste donc le levier le plus solide de sa stratégie et ... le plus différenciant. Si Booking, de son côté, assume avoir recours principalement à des gestionnaires immobiliers pour amasser d'un seul coup un maximum d'offres, Vrbo affirme se distinguer, de son côté, en proposant plutôt des "maisons entières" ... comme quoi, dans le marché de la location de courte durée, chacun y va de sa propre stratégie et, à la différence des hôtels, la similitude des catalogues n'est pas de mise.