Comment Booking s'attaque aux attractions et aux loisirs

C'est un fait, les OTAs ne veulent pas en rester là ! Si leur fonds de commerce historique repose sur la réservation d'hébergements, leur ambition est bien de vendre aux voyageurs toute la gamme possible de ce qui peut composer un voyage; à savoir, du billet d'avion (voire de train), de la location de voitures et ... des expériences (un terme désormais commun qui regroupe à la fois les loisirs et les attractions). Booking, par exemple, nourrit de très grandes ambitions en ce domaine et cherche toujours comment "cracker" le modèle car vendre des attractions n'est pas aussi simple que des chambres ...

Un (ou une) OTA (Online Travel Agency) est, ni plus ni moins, qu'un hypermarché du voyage. Son succès tient donc, en premier lieu, à sa capacité à proposer plus de rayons que ses concurrents et, dans chaque rayon, plus de produits et de marques que ses concurrents. C'est ainsi que les voyageurs se disent qu'ils y trouveront finalement tout ce qu'il recherchent sans devoir passer d'un magasin à un autre. Ceci explique aussi pourquoi les OTAs se livrent une course frénétique au grossissement de leur "catalogue": plus Booking, Airbnb et Expedia (et sa galaxie de marques) proposeront des masses d'hébergements différents, plus les voyageurs considéreront que c'est vers eux qu'il leur faut aller d'abord pour trouver "chaussure à leur pied".

N'oublions pas, en effet, que 90% des recherches de séjour (et donc, des intentions de réservations) commencent sur Google puis, immédiatement après, se poursuivent sur les OTAs. Ces derniers font office, quasiment, d'un moteur de recherche à part entière : le voyageur sait qu'il lui suffit de taper une date et un lieu pour se voir proposer tous types d'hébergements, avoir une vue immédiate sur les prix (et leurs tendances) et, même, si la destination est particulièrement prisée pour ces dates. La preuve que les OTAs ont finalement imposé ce passage obligé: d'après les derniers rapports financiers de Booking, 60% de son trafic se ferait "en direct"; c'est-à-dire, sans passer par la case Google ! De manière irréversible, donc, les OTAs se sont imposés comme de grandes surface du voyage où l'on peut tout trouver pour agrémenter ses envies d'évasion ... ou presque. Car les OTAs ont toujours eu beaucoup de difficultés à s'approvisionner et à s'imposer sur d'autres domaines que les nuitées. Mais cela, n'est que temporaire (voir plus loin).

Evidemment, quand on observe la puissance de feu d'un Booking, on se dit que distribuer autre chose que des nuitées ne devrait pas être une simple gageure. Et pourtant, si Booking a réussi à vendre des billets d'avions ou des locations de voitures dans des conditions et des délais assez rapides, il n'en est pas autant pour les activités.

Pour les premiers (billets d'avions et locations de voitures), l'affaire est plus simple, en effet. Ces "produits et services" sont, depuis bien avant l'ère de "l'internet", distribués de manière centralisée et électronique par des GDS (Global Distribution System) que l'on connaît mieux sous les noms de Sabre ou d'Amadeus. Ainsi, un OTA qui veut vendre des billets d'avion, n'a qu'à se connecter une seule fois à ces plateformes géantes et il lui est aussitôt possible de vendre la quasi totalité de ce que la planète compte de compagnies aériennes. Idem pour les locations de voitures dont les tenants du marché sont concentrés entre les mains de moins d'une dizaine de grandes compagnies avec lesquelles Booking a pu discuter rapidement (à la différence des hôtels, notamment en Europe, éparpillés entre des dizaines de milliers de propriétaires). Se mettre à distribuer ces produits n'est donc pas le défi le plus compliqué pour les OTAs ... et d'ailleurs, ça marche ! Puisque dans son rapport financier, ces deux "segments" progressent de 57,6% (billets d'avion) et de 19,7% (locations de voitures) là où les nuitées vendues ne progressent "que" de 17,1%. La dynamique est donc bien là !

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Le saviez-vous ? Booking possède sa propre plateforme de locations de voitures avec Rentalcars.com qui propose la location dans plus de 52 000 sites à travers le monde. Booking propose également des services de réservation de taxis et de "voitures noires" dans plus de 1 600 aéroports à travers le monde. En 2023, Booking a déclaré avoir vendu pour 74 millions de journées de location de voitures (+19,7% par rapport à 2022).

Comment Booking a résolu le défi de son "inventaire"

La vente des "expériences" (une entrée dans un musée, une location de vélos, une journée dans un parc accrobranches, une visite guidée ...) consitue bien la "nouvelle frontière" de Booking (et de ses concurrents). Car il s'agit là du complément idéal à tout séjour. Pour s'imposer sur ce marché, le premier défi est de constituer un "inventaire" significatif et donc, comme pour les locations de voitures, d'être en capacité de proposer des activités dans, au moins, les principales destinations vendues par Booking. Mais l'affaire n'est pas aussi simple. Le marché (des deux côtés de l'Atlantique) est fragmenté entre des centaines de milliers d'acteurs indépendants, chacun équipé de sa propre solution ou disposant d'une solution spécifique parmi des dizaines de solutions, etc. Se connecter à toutes ces offres n'est donc pas aussi simple que d'aller se connecter aux compagnies aériennes ou aux loueurs de voitures.

D'ailleurs, Booking en a vite tiré la leçon en s'évitant cet ecueil et en choisissant de se connecter à des agrégateurs d'offres ou à des OTAs spécialisées dans les activités comme Viator (filiale de Tripadvisor et leader du marché) ou encore Klook (son alter ego sur les marchés asiatiques). En clair, pour se "vendre" sur Booking, un pro des loisirs doit donc avoir d'abord un "deal" avec Viator. Et cela ne devrait pas bouger de sitôt puisque lors de son dernier échange avec les investisseurs (à l'occasion de la présentation de son rapport financier 2023), Glenn Fogel, l'emblématique patron de Booking a déclaré que Fogel a développer cette partie de l'entreprise par une connexion à d'autres sources que ces OTAs (de loisirs) n'est pas une priorité pour le moment. En clair, comme pour les compagnies aériennes connectées via un seul "tuyau" que sont les GDS (voir plus haut), choisir de s'approvisionner à Viator lui permet instantanément de proposer des expériences sur plus de 1200 spots touristiques mondiaux et, notamment, ceux qui font le plus de ventes. Il est donc évident d'affirmer que Booking semble avoir résolu son premier défi d'approvisionnement.

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Comment vendre ses loisirs sur Booking ? Prenez un bon channel manager (elloha, par exemple 😅) qui soit déjà connecté à Viator (le premier vendeur de loisirs au monde). Signez votre deal avec Viator et vous voilà aussitôt distribué sur Booking !
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Les activités se vendent plutôt "en sec" qu'en "package"

L'autre défi portait sur la manière de vendre les loisirs. Nombreux, pendant des années (y compris en France), ont pensé que le digital allait instaurer l'ère du "voyage connecté" ou comment un voyageur allait composer son séjour sur un seul et même site en mettant dans son panier plusieurs produits différents (transport, hébergement, expériences ...) et ne passer qu'une fois à la caisse.

Si Booking a, pendant un temps, imaginé que le "voyage connecté" serait une possibilité, les dernières déclarations de son big boss semblent définitivement enterrer cette lubie. Selon ses dernières déclarations aux analystes financiers, les "voyages connectés" ont, certes, grossi de 50% mais sur une base faible"; ce qui n'avait pas empêché, au demeurant, de constater une très forte augmentation des ventes de locations de voitures et d'attraction en "mode sec"; c'est-à-dire, vendus de manière isolée.

En clair, les voyageurs peuvent tout acheter sur une seule et grande plateforme, mais ils ne privilégient pas forcément de le faire au même moment: d'abord le transport, quand c'est le cas, puis l'hébergement (puisque les prix y varient beaucoup) et, enfin, les expériences; une étape à chaque fois qui correspond bien aux habitudes de consommation de voyages que nous connaissons tous.

Pour autant Booking, sait booster ses résultats en la matière en faisant des ventes croisées "asynchrones". Concrètement ? Vous avez réservé un hébergement sur Booking et quelques jours avant votre arrivée, la plateforme vous adresse un email pour vous souhaiter la bienvenue sur votre prochaine destination, sans omettre de vous lister quelques expériences à réserver (via son intermédiaire). Selon nos estimations, cette méthode est certainement la bonne car le voyageur a déjà donné sa carte bancaire à Booking, il n'a plus qu'à cliquer sur un lien et à choisir la ou les expériences de son choix ... en toute confiance. Mais aussi, avec un intérêt manifeste puisque Booking vient d'annoncer une nouveauté qui pourrait l'aider à booster encore plus fort ses résultats en la matière.

Genius pour les "expériences"

On l'a vu plus haut, l'une des forces de Booking est d'attirer les voyageurs directement sur son site ou son appli ... et de les fidéliser ! Grâce à son programme "Genius" (financé par des commissions spécifiques payées par les hébergeurs), Booking peut offrir des avantages tarifaires nombreux à ses clients. Et, selon ses dirigeants, depuis cette semaine, l'entreprise travaille sur un test grandeur nature où les voyageurs pourraient aussi cumuler des points Genius lorsqu'ils réservent un billet d'avion ou une attraction ...

C'est dire si ce domaine reste un vaste terrain de croissance pour Booking qui n'hésite donc pas à partager une partie des commissions que lui reverse Viator en la transformant en points Genius qu'elle "offre" à ses clients. Des points que ces derniers pourront bientôt utiliser pour réduire le coût de leur voyage.

En conclusion, les "expériences" figurent bien dans la cible de Booking et des autres OTAs, comme Airbnb qui vient de lancer une catégorie inclassable d'expériences appelée "Icons" (voir plus bas).

Après avoir efficacement tranché sur le moyen de se constituer un inventaire significatif (en faisant appel à Viator) et en considérant que ces produits se vendent plus efficacement en "solo" et non pas forcément en "voyage connecté", Booking vient probablement de fixer ce qui fera le "standard" de la réservation d'expérience sur mobile et internet. Cependant, d'autres forces agissent aussi sur ce marché, en particulier, Google qui avec son service "Things To Do" ou "Activités" est d'ores et déjà en train de s'accaparer un marché qui n'en est encore qu'au stade de la structuration.

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Airbnb lance ses expériences "iconiques" comme proposer des séjours à l'intérieur de la maison Up de Disney et Pixar ou encore du quartier général du film Inside Out 2. Mais ce n'est pas tout, la plateforme mondiale propose aussi des nuits au Musée Ferrari ou au musée d'Orsay ou encore un séjour dans une recréation animée en 2D du X-Mansion de Marvel Animation à Westchester (New York). Ou comment créer des expériences très onéreuses pour un public toujours plus à la recherche d'expériences inédites ... et instagrammables.