La chambre d'hôtes résiste et se transforme

Face à la crise, les chambres d'hôtes font le dos rond et - grâce à la légereté de leur structure - elles sont plus nombreuses que les hôtels à imaginer résister aux conséquences de la crise sanitaire. Au même titre des émissions culinaires qui ont relancé l'appêtit des français pour la cuisine, les nombreuses émissions mettant en valeur les maisons d'hôtes témoignent d'un intérêt grandissant des medias et des voyageurs pour cette forme de vacances apparue il y a 35 ans et soutenue depuis 20 ans par Internet...

En juillet, la tendance d'occupation des maisons d'hôtes semble meilleure que celle des hôtels: 72%, en moyenne, contre 54% pour les établissements de plus grande envergure. La taille, plus réduite, mais aussi un accueil plus personnalisé semblent avoir convaincu les clients d'un séjour plus proche de leurs attentes: croiser moins de monde sans se dispenser d'un service quasi-hôtelier, sinon carrémment hôtelier. Si cette tendance se confirme à la fin de l'été, et que la "casse" s'avère moins forte dans cette catégorie d'établissements, le regain d'intérêt pour les maisons d'hôtes n'en sera que plus fort en 2021. Quand la légereté et l'agilité font bon ménage, les conditions de traversée de la crise ne sont plus les mêmes d'un professionnel du tourisme à l'autre ...

Faites revivre la maison de Mamy, partagez ses racines

"Tenir une maison d’hôtes, c’est tout un métier", confie la propriétaire de La "Maison du Carrec", une véritable institution à Paimpol, dans les Côtes-d’Armor. Les espaces confortables de cet établissement breton, avec vue sur mer et spécialités gastronnomiques du pays, sont de solides arguments. Mais l'accueil en milieu restreint, à la carte, ne s'improvise pas, selon la patronne des lieux, Isabelle Olivry. Cette professionnelle du "tourisme sensible" a ouvert sa maison d’hôtes en 2014 après un séjour à Paris. C'est dans la maison de sa grand-mère qu'elle a renoué avec ses racines, avec l'envie de les partager, de transmettre, de fournir de vraies valeurs à ses hôtes en manque. Et s'il s'agissait de l'une des formules magiques du tourisme 3.0 ?

L'amateurisme a vécu

La sympathie ne s'oppose pas au sérieux : la chambre d’hôtes d’antan a vécu. le client de 2020-2025 attend des services de qualité et personnalisés, dans le cadre d'une «hôtellerisation». Dans notre décennie, Une chambre d’hôtes, c'est un petit hôtel de 1 à 5 chambres, auquel s'ajoute l’authenticité. Cependant, ces logements de vacances n'ont pas (encore) de syndicats qui les défendent et leur procurent des formations stratégiques. Leur charme découle de leur marché non structuré, sans standardisation. Souvent la vie personnelle et professionnelle des hébergeurs sont mêlées, la personnalisation des lieux est au maximum, sans imitations. L'absence de repères administratifs et de classement par étoiles soulignent une originalité liée à une liberté, appréciée par certains consommateurs d'expériences (enfin) imprévues.

Mettez-vous à la place de vos clients, urbains et stressés

Se sentir hors du temps, rassuré, confiant, se sentir soi-même, découvrir certains aspects de sa propre personne, de son conjoint et de sa famille... voilà les vertus de la chambre d'hôtes telle qu'on l'attend. Nous voilà face à un échange entre humains du XXIe siècle (ce siècle vieux de 20 ans déjà !), coincé entre l'atomisation de la société en particules individuelles, et l'ouverture vers notre nature vieille vomme le monde : hommes, femmes, enfants, en quête permanente d'équilibre. Isabelle Olivry nous livre une partie de la solution "magique" (revenons-y) : "J’avais envie de partager ça, de faire en sorte que tout le monde puisse ressentir la même chose que moi quand je venais étant petite. J’ai même gardé un coffre avec mes anciens jouets pour les enfants". Voilà le sommet de l'expérience à partager, non pas celle de l'emprunt des souvenirs à une époque globale et collective, mais celle d'un temps intime, singulier, partageable : j'ai des souvenirs, je vous les donne. En somme, le (bon) soin que vous porterez à votre chambre d'hôtes ne reposera sur la satisfaction express, superficielle, que vous procurerez à vos clients, pendant 72 heures furtives en été, mais sur l'expérience vécue que vous leur insufflerez par le simple fait de votre expérience, qui n'a pas de prix pour de nombreuses personnes prises dans le tumulte contemporain. Expérience ? Celle-ci peut-être strictement personnelle, familiale, territoriale, issue d'un savant mélange en les influences qui conforment votre personnalité, c'est à dire celle de votre lieu d'accueil.
© Château Malvoisin

"C'est tout un métier"

"C'est tout un métier", cela signifie que le doute est levé sur le caractère d'improvisation lié aux chambres d'hôtes d'il y a quelques années, pas très éloignées des pensions de famille. L'amateurisme n'a plus sa place, Le sérieux de cette activité professionnelle a été confirmé, malgré son statut annexe et secondaire (sans connotation péjorative). Au contraire, l'attention que vous lui porterez est le gage d'un avenir florissant, dans une période remplie de doutes. Par opposition généreuse, face au doute, proposez des certitudes. Votre chambre d'hôtes ancrée dans son territoire, de la façon la plus actuelle possible (les racines donnent des arbres !) fera revenir vos clients. Les chambres d’hôtes qui fonctionnent le mieux sont gérées par des exploitants passionnés. Ils assurent la qualité et sont ambassadeurs de leur territoire. En quelque sorte, ile remplacent l’Office de Tourisme, car ils savent, ils informent, conseillent (et déconseillent) et suggèrent. Confiance et passion animent ces propriétaires heureux.

On monte en gamme, encore et encore

Le marché de la chambre d’hôtes est mature et relativement élitiste. Les lieux sont devenus insolites : à la campagne, sur le littoral, à la montagne ou encore en ville, du château à la ferme, de la maison d'achitecte à l’appartement et même au lotissement. La chambre d'hôtes se loge aussi dans l'insolite des bateaux, tipis, cabanes et roulottes. De toutes les façons, la montée en gamme est une constante.

60 000 chambres d'hôtes en France, 65% indépendantes

Vous êtes propriétaire d'une chambre d’hôtes en France ? Cette année, 21 500 loueurs assurent, comme vous, la gestion de 60 000 chambres d’hôtes. Le nombre de lieux, en forte augmentation de 2000 à 2010, s'est stabilisé. Les maisons d’hôtes constituent 10% des hébergements touristiques marchands, leur nombre de lits incarne 2% de l’offre totale. Nous voilà loin de l'industrie des campings, des hôtels et locations de vacances. Seulement 35% des loueurs de chambres d’hôtes sont sous label (Gîtes de France, Clévacances, Chambres d’hôtes Référence etc). En moyenne, le taux d’occupation atteint 30 %, soit 110 jours par an, pour un tarif de 86 euros pour deux personnes (avec petit déjeuner, mais hors taxe de séjour). La moyenne nationale était de 65,2 euros la nuit pour 2 (avec petit-déj) en 2009...
Environ 33% des chambres d'hôtes sont aussi des tables, dont les repas représentent 24 euros par personne. En moyenne, trois chambres d’hôtes occupées à 30% suscitent 30 000 euros de chiffre d’affaires annuel (8 700 euros de revenu net par an).